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Laurent Brun: Sur la question de la sécurité, la gauche doit elle intervenir ?



Certains mélangent la stratégie du gouvernement de restriction des libertés publique avec la stratégie de sécurité publique.
Personellement je ne mélange pas l’utilisation faite par le gouvernement des CRS, des BRAV et autres pendant les manifs, leur stratégie de conflit et de provocations, leur objectif de réduction par la force du mouvement social, avec la question des moyens de sécurité publique face aux crimes divers (agression, trafics, vols...).
Parmi les criminels, il y a beaucoup de gens brisés par le système économique, mais il y a aussi de vrais capitalistes, qui savent ce qu’ils font et qui l’assument.
Dans ma ville de banlieue lyonnaise, les caïds du trafic de drogue ont décidé de privatiser certains quartiers pour que leur business se fasse tranquillement. Ils emploient des nervis pour casser la tête aux livreurs, aux médecin ou aux pompiers qui viennent dans le quartier, ils font cramer les bagnoles des voisins... Ça s’est amplifié depuis un mois parce qu’ils sentent venir le deconfinement et qu’ils avaient été tranquilles pendant le confinement donc ils veulent conserver cette « tranquillité ».
Or en face, il y a très peu de moyens policiers, notamment la nuit (un seul équipage de 3 agents pour une ville de 60000 habitants!).
Donc oui il faut de la prévention, du social, de la traque du blanchiment d’argent pour faire tomber les barons, etc... Les communistes ont des propositions là dessus. Oui les chouff ou les petits vendeurs n’ont pas d’autre perspectives sociales et donc avec une vraie politique juste ils rentreraient dans une activité légale (40% de chômage dans les quartiers concernés).
Mais les caïds dont je parle sont les « cadres intermédiaires » du business. Ceux la ils défendent leur activité et leur « poste ». Il y a un an, ils ont ordonné l’exécution en plein centre ville et en plein jour d’un vendeur (probablement un concurrent qui tentait de s’installer). Ça c’est du factuel, du vécu, pas de l’imaginaire romantique.
Je n’ai pas la naïveté de penser que ces personnes là rentreront dans le rang juste avec de la pédagogie. S’ils travaillaient en entreprise, ce seraient cette sorte de DRH qui est près à pousser un salarié au suicide pour atteindre ses objectifs. Donc oui, pour ces cas là, qui sont minoritaires mais qui sont au cœur de la structuration de l’organisation mafieuse (ils ne sont pas à sa tête mais ils la font tenir et ils en retire un statut social très privilégié) il faut un appareil repressif. Ça n’est pas une carte blanche à la police dont il faut par ailleurs extirper les éléments racistes ou factieux. Mais la question des moyens (Roussel propose 30 000 postes de policiers supplémentaires) et de l’Arsenal législatif est posée. Ce n’est pas une question d’extrême droite, notamment parce que cette dernière ne pose que la répression, sans la question sociale ou la lutte contre les circuits de blanchiment (ce que fait Roussel). Il faut rappeler d’ailleurs que le RN s’est abstenu, ou a rejeté, la majorité des textes luttant contre la fraude fiscale, le blanchiment et l’optimisation des multinationales.
Donc le PCF, comme l’ensemble de la gauche, ne doit pas laisser cette question au RN. La gauche est légitime à proposer des solutions sur ce sujet.
Parmi ces solutions il y a beaucoup de mesures sociales, beaucoup de mesures sur le contrôle des circuits financiers et aussi des moyens pour la police (et la justice).
Quand Roussel propose que les circonstances aggravantes soient étendues des policiers à l’ensemble des salariés ayant une autorité (pompiers, profs...) il veut justement montrer que le policier n’est pas le seul qui doit être défendu parce que la police n’est pas la seule réponse. Aujourd’hui la circonstance aggravante est systématique dans le cas d’un policier mais doit faire l’objet d’une analyse pour les autres professions des services publics.
Donc nous avons besoin de débattre de ces sujets pour ne pas tomber dans les pièges de la droite et l’extrême droite (la « sécurisation » sociale doit rester notre priorité, elle doit mobiliser l’essentiel de notre energie) mais il n’est pas question de nous interdire de traiter le sujet, qui est un sujet de société.
Et à l’occasion de la mort d’un agent de police, qui est inacceptable au même titre que la mort de tout salarié au travail, il est légitime d’aborder ces questions, il est légitime de rendre hommage et d’apporter son soutien à la famille. Que des éléments politiques ou syndicaux d’extrême droite tentent de s’emparer du sujet n’est pas une raison pour l’éluder. Il faut au contraire mener la bataille politique pour extirper cette question de l’instrumentalisation par les tachistes (on se rappelle d’ailleurs qu’un jeune cadre du FN a été condamné pour avoir incendié des voitures afin de mieux dénoncer l’insécurité).

A débattre!


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