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Pétrole et paradis fiscaux : les intérêts cachés de la ministre de la transition énergétique



PUBLIÉ LE 08 NOV. 2022 PAR DISCLOSE

Agnès Pannier-Runacher est liée à une société créée par son père, en 2016, pour le compte de ses enfants mineurs. Baptisée Arjunem, l’entreprise familiale partage des intérêts financiers avec Perenco, numéro 2 du pétrole en France, et détient plus de 1 million d’euros dans des paradis fiscaux. Malgré le risque de conflit d’intérêts, la ministre de la transition énergétique n’a jamais rendu publique son existence.


PUBLIÉ LE 08 NOV. 2022 
PAR DISCLOSE



C’est un immeuble résidentiel comme tant d’autres dans le 16e arrondissement de Paris. Une façade de baies vitrées avec balcons en fer forgé, loge de gardien et ascenseur de service. C’est ici, au 56 avenue Georges Mandel, qu’est enregistré depuis le 13 juillet 2016 le siège d’une discrète société liée à la ministre de la transition énergétique, Agnès Pannier-Runacher. Son nom : Arjunem.

Un acronyme derrière lequel se cache une donation familiale que cette macroniste de la première heure n’a jamais rendue publique. Elle a pourtant eu par deux fois l’occasion d’en informer la Haute autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP), lors de sa nomination au ministère de l’économie en 2018, puis à celui de l’industrie en 2020. Or, ses déclarations d’intérêts et de patrimoine ne font aucune mention de cette affaire d’héritage.


D’après l’enquête de Disclose et Investigate Europe (IE), le montage d’Arjunem, qui prend sa source dans des paradis fiscaux, renferme un possible conflit d’intérêts entre la ministre de la transition énergétique et le groupe Perenco. Une firme opaque, deuxième producteur français de brut après TotalEnergies, dont Jean-Michel Runacher, associé d’Arjunem et père de la ministre, était jusqu’à récemment l’un des dirigeants historiques. Un héritage difficile à porter pour une responsable publique dont l’objectif affiché est de « sortir la France des énergies fossiles ».

DES FONDS BASÉS DANS DES PARADIS FISCAUX

Sur le papier, Agnès Pannier-Runacher n’est pas tenue de dévoiler l’existence d’Arjunem. La loi sur la transparence de la vie publique, votée dans la foulée du scandale Cahuzac, l’oblige seulement à déclarer ses participations directes dans des sociétés, ainsi que celles de son conjoint. Les biens des enfants mineurs, eux, n’ont pas à être communiqués. Une aubaine. Car, selon les statuts constitutifs de la société, ce sont ses trois enfants – âgés de 13 ans, 10 ans et 5 ans en 2016 – et un de leurs cousins qui ont pris place à la table des actionnaires aux côtés de leur grand-père, Jean-Michel Runacher. L’objectif de l’opération pour l’homme fort de Perenco : faire une donation de plus d’un million d’euros à ses petits-enfants, en évitant qu’ils n’aient à payer des droits de succession à son décès. Au même moment, Jean-Michel Runacher va créer une autre société civile, Antos, dotée d’un capital de près de 600 000 euros réservés à deux neveux, majeurs, de la ministre.


INVESTISSEMENTS SPÉCULATIFS

L’histoire de la société civile Arjunem débute à la fin du mois de juin 2016. C’est à cette période qu’Agnès Pannier-Runacher, alors administratrice de grands groupes privés et sur le point de rejoindre la campagne d’Emmanuel Macron, va signer les documents autorisant ses enfants mineurs à devenir actionnaires de l’entreprise pour la somme symbolique de 10 euros chacun. Jean-Michel Runacher apporte le reste du capital : 1,2 million d’euros sous forme d’investissements spéculatifs.




D’après notre enquête, l’ensemble de ce patrimoine provient de fonds spéculatifs dissimulés dans des paradis fiscaux et dans lesquels Perenco détenait ses propres investissements à l’époque. Sollicitée pour savoir si c’est toujours le cas, la compagnie a refusé de le confirmer ou de l’infirmer.

Le premier fonds, baptisé « Blue Omega Cell », est domicilié à Guernesey, un paradis fiscal qui figurait sur la liste noire de l’Union européenne jusqu’en 2019. Le second, « MW Global Opportunities », est immatriculé en Irlande et investit depuis Hong Kong. Pour le troisième Disclose et IE ont pu établir qu’il est géré par « Millennium Management », un gestionnaire basé à Londres et New York et dont la holding actionnaire se trouve dans le paradis fiscal de l’Etat américain du Delaware.


I

nterrogée sur la nature des trois fonds spéculatifs qui alimentent la société familiale, la ministre de la transition énergétique assure « ne pas avoir connaissance de leur politique d’investissement » gérée, dit-elle, « de manière indépendante par des investisseurs professionnels. » Concernant leur présence dans des paradis fiscaux, elle n’a pas souhaité faire de commentaire, renvoyant vers son père « pour plus de détails ». Sollicité, ce dernier n’a pas donné suite. Les gestionnaires qui administrent ces fonds ont pour habitude de créer des sociétés offshores dans des pays à la fiscalité avantageuse tels que les Bahamas et les îles Caïmans. Quant à leurs investissements, ils incluent bien souvent des entreprises d’hydrocarbures.

Par ailleurs, le capital investi dans Arjunem a été déposé dans une banque privée au Luxembourg, CBP Quilvest. Un établissement qui a déjà compté comme clients la famille Perrodo, propriétaire de Perenco et 15e fortune de France.


LES LIENS ENTRE ARJUNEM ET PERENCO

A l’époque où Jean-Michel Runacher créer Arjunem, sa fortune est si étroitement liée à celle du groupe pétrolier que les fonds investis dans l’entreprise familiale proviennent des mêmes placements que ceux de la compagnie pétrolière. Un mélange des genres qui apparaît dans une série de courriels joints aux documents d’enregistrement de la société et dans lesquels les cadres de Perenco et Jean-Michel Runacher échangent avec les représentants de Millenium, Marshall Wace et Sciens Group. Au cœur des discussions : la valeur des fonds dans lesquels Perenco a investi.



Le 5 juillet 2016, l’un des gestionnaires de fortune des Perrodo adresse un courriel à la firme Millennium pour obtenir, écrit-il, « une estimation des retours sur investissement de notre portefeuille ». Jean-Michel Runacher est en copie du message. Lorsqu’il reçoit la réponse de Millennium, il la transfère aussitôt à son notaire parisien. Pour que ce dernier puisse « finaliser » l’enregistrement d’Arjunem, il répète la démarche pour Blue Omega et MW Global Opportunities.

Au cours de la correspondance, une autre entité du groupe pétrolier fait son apparition : Finvest. Basée aux Bahamas et à Guernesey, cette société de gestion de portefeuille des Perrodo a longtemps été dirigée par Jean-Michel Runacher lui-même.





Il faut dire que ce cadre historique du groupe, aujourd’hui âgé de 77 ans, fut un personnage clé du développement de la compagnie pétrolière. Associé à son fondateur, Hubert Perrodo, dès les années 1980, Jean-Michel Runacher sera nommé tour à tour directeur général, directeur financier et administrateur du groupe jusqu’en 2020. Désormais, selon un porte-parole de Perenco, Jean-Michel Runacher conseillerait l’entreprise « de temps en temps ». Rien de plus.

Pourtant, selon notre enquête, il serait toujours dirigeant d’au moins deux sociétés financières de la multinationale : Global Financial Investment SA, et la BNF Capital, à Londres, où il réside.

« SITUATION DE CONFLIT D’INTÉRÊTS »

En dépit des liens financiers unissant la société Arjunem à des fonds opaques associés à Perenco, la numéro 2 du ministère de l’écologie estime qu’elle ne se trouve pas en situation de conflit d’intérêts : « Il ne s’agit pas de mon patrimoine, mais de celui de mes enfants qui, eux-mêmes, n’ont aucun pouvoir de gestion de la société à ce jour », assure-t-elle, révélant par la même occasion qu’ils sont aujourd’hui propriétaires à 100 % d’Arjunem. Concernant les liens familiaux avec le groupe pétrolier, Agnès Pannier-Runacher considère qu’elle n’a pas « vocation, ni par ailleurs aucune obligation légale à être associée aux activités professionnelles » de son père et affirme n’avoir jamais eu à traiter de « dossiers en lien avec Perenco ». Selon elle, il n’existerait « aucune ambiguïté » sur le fait qu’elle n’a pas à mentionner la société de ses enfants.

L’association Anticor n’est pas de cet avis. « Cela ne fait aucun doute que la ministre est dans une situation de conflit d’intérêts », estime Béatrice Guillemont, directrice générale de l’organisation et docteure en droit de la probité. « Elle aurait dû déclarer la société préventivement dans la catégorie observations dès sa nomination en 2018 », ajoute-t-elle. Ce que confirme la HATVP, jointe par Disclose et IE. « L’absence d’obligation déclarative ne dispense pas le responsable public de veiller à prévenir et faire cesser les situations de conflits d’intérêts qui naîtraient d’autres intérêts indirects détenus, tels que l’activité des enfants ou d’autres membres de la famille », déclare l’institution, précisant qu’elle « porte une attention particulière aux infractions à la probité et peut le cas échéant transmettre un dossier à la justice en application de l’article 40 du code de procédure pénale. »

Par le passé, Agnès Pannier-Runacher a déjà dû se déporter de plusieurs entreprises afin d’éviter le conflit d’intérêts. Ce fut notamment le cas de la société Bourbon, le leader des services maritimes aux plateformes offshores, dont elle fut administratrice et présidente du comité d’audit. Une entreprise dont l’un des clients n’est autre que la pétrolière Perenco.
Leila Miñano, Maxence Peigné, Manuel Rico (Investigate Europe), Mathias Destal, Geoffrey Livolsi (Disclose)

Vous avez connaissance d’informations sur Perenco et/ou les intérêts de la ministre Agnès Pannier-Runacher. Vous pouvez nous contacter de façon confidentielle sur Signal, Proton ou notre Secure Drop.

Le capitalisme sous perfusion d'aides publiques

Le rapport sur les aides publiques « Un capitalisme sous perfusion » commandé par la CGT à l’Ires a décortiqué et analysé le maquis des aides destinées aux entreprises. Le résultat est édifiant : il existe plus de 2000 dispositifs de soutien, pour un montant total de 157 milliards !



Quel est le montant des aides d’État aux entreprises ? Pour la première fois, une étude donne un chiffre clair : 157 milliards !

« L’essentiel de ces mesures sont des exonérations de cotisations sociales, et le reste consiste en niches fiscales » précise Mathieu Cocq, économiste CGT.

 

Des montants colossaux

En 2019 (avant le covid) le montant des aides publiques aux entreprises était multiplié par 5 depuis la fin des années 90. Ce chiffre ne tient pas compte des mesures d’urgences mises en place pendant la crise sanitaire (environ 80 milliards d’euros) ni de celles liées à la crise énergétique actuelle, puisqu’elles ne sont pas appelées à durer.

« C’est la première dépense de l’État, poursuit-il. Elle représente plus de 30 % du budget de celui-ci. »

La mise en perspective de ce montant est très parlante cela correspond à :5 fois la dette des hôpitaux,
2 fois le budget de l’Éducation nationale
6 fois celui de l’Enseignement supérieur et de la recherche.

La comparaison avec les 15 milliards d’euros de déficit prévu dans 10 ans pour les retraites laisse songeur. Ou encore avec le coût de la revalorisation du point d’indice de 10 %, soit 2,1 milliards d’euros (environ 7 fois moins que le coût des aides aux entreprises !)

Ces montants colossaux ne tiennent évidemment pas compte de la fraude fiscale et sociale.

Ne rentrent pas non plus dans leur comptabilisation les « mesures déclassées », ces mesures qu’on décide de ne plus compter "officiellement", considérant qu'il s'agit de la nouvelle norme fiscale.

Prises en compte, ces dernières feraient monter le chiffre à 200 milliards d’euros par an !

Aides publiques et coût du travail

Cette étude souligne ainsi la relation entre l’État et le capital, soutenu massivement, voire maintenu sous perfusion grâce à ces aides massives. Avant de servir aux citoyens, l’argent public sert à garantir aux entreprises comme à leurs actionnaires un niveau de profit minimal.

Conséquence : une hausse de la dette publique et un transfert des prélèvements obligatoires (impôts, taxes, cotisations sociales) des entreprises vers les ménages.
Le taux de prélèvements obligatoire pour les entreprises était de 16,5 % en 1995, et de 15,5 % en 2019. Dans le même temps, celui des ménages est passé de 25,5 % à 28,5 %.

Il a par ailleurs été démontré que les aides publiques qui diminuent le coût du travail n’agissent pas en fonction de l’emploi. Ainsi, un récent rapport de France Stratégie montre que la transformation du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) en baisse pérenne de cotisations sociales pour les employeurs n’a pas eu d’effets significatifs sur l’emploi.

Le rapport propose des pistes pour transformer cette dilapidation de l’argent public :préférer un investissement direct dans les services publics et des nationalisations plutôt que des aides publiques,
attribuer des aides sous conditions ;
ne pas permettre le versement de dividendes en cas d’aide publique
ouvrir des négociations obligatoires sur le temps de travail et les salaires

Le 10 novembre prochains partout en France, mobilisons-nous dans les entreprises et les services.






Il n'y a pas de pognon en France. Mais pour les entreprises, ce sont 157 milliards d'euros d'aides publiques.

Pour ceux qui ne suivent vraiment pas, la France est la deuxième puissance économique au sein de l'UE du capital et dans le top 7 au niveau mondial, quand l'inflation galope dans notre pays et que votre pouvoir d'achat dégringole.
Le rapport sur les aides publiques « Un capitalisme sous perfusion » commandé par la CGT à l’Ires (Institut de recherches économiques et sociales) a décortiqué et analysé le maquis des aides destinées aux entreprises. Le résultat est édifiant : il existe plus de 2000 dispositifs de soutien, pour un montant total de 157 milliards !

« L’essentiel de ces mesures sont des exonérations de cotisations sociales, et le reste consiste en niche fiscale
» précise Mathieu Cocq, économiste CGT.

Ce chiffre ne tient pas compte des mesures d’urgences mises en place pendant la crise sanitaire (environ 80 milliards d’euros) ni de celles liées à la crise énergétique actuelle, puisqu’elles ne sont pas appelées à durer.

La mise en perspective de ce montant est très parlante, cela correspond à :5 fois la dette des hôpitaux,
2 fois le budget de l’Éducation nationale
6 fois celui de l’Enseignement supérieur et de la recherche.

La comparaison avec les 15 milliards d’euros de déficit prévu dans 10 ans pour les retraites laisse songeur. Ou encore avec le coût de la revalorisation du point d’indice de 10 %, soit 2,1 milliards d’euros (environ 7 fois moins que le coût des aides aux entreprises !)
Ces montants colossaux ne tiennent évidemment pas compte de la fraude fiscale et sociale.(...)



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Cinq cents familles : une fortune qui ne tombe pas du ciel !


Chaque année les ultrariches sont de plus en plus riches ; une telle montée des inégalités résulte de choix politiques précis. Le mal est profond, la gangrène gagne tous les pans de la société au point d’en arriver à une sorte de pourrissement lent d’un système qui peut emporter avec lui toute la civilisation. Il est indispensable de s’engager dans a construction d’un nouveau système pour une civilisation de toutes et de tous.

l'IFI a été payé par 132 722 contribuables en 2018, contre 358 000 imposables à l’ISF en 2017.



À intervalles réguliers, environ chaque année, est publiée la liste des plus grosses fortunes de France, les dites cinq cents familles. Une manière pour les médias et autres réseaux d’influence de se donner bonne conscience une fois par an. Chacun y va de sa petite tirade sur l’augmentation des inégalités et jure la main sur le cœur qu’il faut empêcher que cela dure. Morale judéo-chrétienne quand tu nous tiens ! Mais c’est pour aussitôt refermer soigneusement la porte sur cette réalité et la faire retomber dans l’oubli. Il est vrai que pour changer un tel état des choses il faut plus que des déclarations de bonnes intentions, voire que quelques aménagements.



Une entreprise qui ne craint pas la crise

Le constat est en tout éclairant. Chaque année les ultrariches sont de plus en plus riches. Le dernier classement publié par le journal économique Challenges l’atteste. Un fossé sans cesse plus profond se creuse entre les plus riches et les autres. Jugez-en plutôt ! Le patrimoine cumulé des cinq cents familles a progressé de 730 milliards d’euros en 2020 par rapport à 2019, soit une augmentation de 3 %. Comme quoi la crise de la covid n’aura pas pénalisé tout le monde !
Une barre symbolique jamais atteinte jusque-là, a même été franchie. Il s’agit de celle des 100 milliards d’euros. C’est le montant de la fortune de Bernard Arnault, le patron de LVMH. Une fortune qui a encore augmenté en un an. Ce n’est pas un hasard, le luxe est le secteur qui a le mieux résisté à la crise sanitaire. Enfin, l’actif net total imposable à l’ISF était de 1 028 milliards d’euros fin 2017 au moment de sa suppression, il serait aujourd’hui d’environ 1 500 milliards d’euros.

« L’argent c’est le nerf de la guerre, le pouvoir d’en décider l’utilisation est le cœur de la lutte des classes aujourd’hui. »

D’autres indicateurs comme l’héritage attestent également l’accumulation de patrimoine au cours de ces dernières années. Ainsi la part des 1 % des fortunes les plus élevées dans le patrimoine total est passée de 15 % à̀ 25 % entre 1985 et 2015. Une évolution confirmée par d’autres données montrant que 10 % des transmissions par succession et donation en ligne indirecte rapportent plus de 50 % des droits de mutation à̀ titre gratuit (DMTG) ; 1 % des héritiers pouvant désormais obtenir, par une simple vie de rentier, un niveau de vie supérieur à celui des 1 % des « travailleurs » les mieux rémunérés. Ainsi, depuis la fin du XXe siècle, le patrimoine hérité occupe une part de plus en plus grande dans l’accroissement des inégalités.



Une situation qui ne vient pas de nulle part

S’il est juste et sain d’être indigné par une telle montée des inégalités, celles-ci ne viennent pas de rien mais résultent de choix politiques précis, réfléchis et mis en chantier de façon déterminée depuis le début des années 1990. Cela renvoie à une double évolution.

D’une part la gestion des entreprises et l’utilisation de l’argent. Car l’argent accumulé dans les mains de quelques détenteurs ne vient pas de nulle part mais, pour une large part, de la production. Pour preuve, l’enrichissement de Bernard Arnault tient à l’extrême bonne santé de l’industrie du luxe et qui dit industrie dit production de sacs et d’autres produits luxueux par des femmes et des hommes qui lui vendent leur force de travail. Une force de travail dont la reconnaissance dans la valeur ajoutée a soigneusement été laminée, (-10 % sur les trente dernières années), pour laisser place aux prélèvements du capital. Ce processus a été accompagné par le dépeçage des droits d’intervention des salariés dans les gestions, lois El Khomri et Macron. Dans le même temps, la création monétaire a été mise au service des marchés, la détournant ainsi des investissements utiles pour des productions respectueuses de l’humain et de la planète. Les banques et la BCE en premier lieu distribuent des milliards sans contrôle, un argent qui sert surtout à alimenter les marchés financiers : du soutien aux dividendes aux OPA en passant par toutes les autres formes de spéculation. Finalement, cela vient gonfler les portefeuilles des actionnaires et autres fonds de pension ou dits « d’investissements ».

« La création monétaire a été mise au service des marchés la détournant ainsi des investissements utiles pour des productions respectueuses des hommes et de la planète. »

D’autre part, il y a l’évolution de la fiscalité, c’est-à-dire la restructuration régressive tant de la législation fiscale que des services et des moyens mis à disposition des administrations financières pour connaître, gérer et contrôler l’impôt, particulièrement celui des entreprises et des contribuables les plus fortunés. Il y a une cohérence entre détournement de l’argent en direction de quelques-uns et recul des droits et des moyens du contrôle fiscal. Comment imaginer que les pouvoirs publics permettraient à quelques-uns d’accaparer toujours plus de valeur ajoutée, toujours plus d’argent issu de la création monétaire et venir ensuite tout leur reprendre par la fiscalité ? Ce serait un vrai supplice ! C’est ainsi que la taxe professionnelle a été supprimée par Nicolas Sarkozy, que le taux de l’impôt sur les sociétés (IS) a été abaissé de 50 % en 1985 à 25 % en 2022, que l’imposition forfaitaire annuelle des sociétés (IFA) et la contribution sociale de solidarité des sociétés (C3S) ont disparu, que l’ISF a été supprimé en 2018 pour laisser la place à l’impôt sur la fortune immobilière (IFI), faisant chuter la base imposable de 1 028 milliards d’euros à 300 milliards d’euros… C’est ainsi que des missions fiscales se sont quasiment volatilisées dans les services fiscaux ; par exemple, tout ce qui relève de la fiscalité des personnes les plus fortunées mais aussi de la gestion et du contrôle en matière de fiscalité immobilière. Dans ce même esprit, ont été soigneusement laminés les moyens permettant le suivi et la vérification des entreprises. Trente mille emplois sur cent soixante-dix mille ont été supprimés au ministère des Finances. Y a-t-il besoin d’aller beaucoup plus loin dans la démonstration ?


Simulation : recettes d’IFI par rapport aux recettes prévisibles si l’ISF existait encore


Sortir de cette impasse exige des réponses à la hauteur

Le mal est profond, la gangrène gagne tous les pans de la société au point d’en arriver à une sorte de pourrissement lent d’un système qui peut emporter avec lui toute la civilisation. C’est pourquoi les réponses doivent s’intégrer dans un projet alternatif de construction d’un nouveau système pour une civilisation de toutes et de tous. Ce projet doit prendre appui sur des propositions précises concernant toute la sphère de l’argent, de celui des banques en passant par celui des entreprises jusqu’à celui de l’État. L’argent, c’est le nerf de la guerre, le pouvoir d’en décider l’utilisation est le cœur de la lutte des classes aujourd’hui. Marx disait en substance que la répartition de la richesse dépend en fait de la façon de la produire. Voilà pourquoi, outre des moyens de contrôle, il est décisif de doter les salariés et l’ensemble des citoyens de véritables pouvoirs d’intervention et de décision dans la gestion des entreprises comme de la cité.

« Depuis la fin du XXe siècle, le patrimoine hérité occupe une part de plus en plus grande dans l’accroissement des inégalités. »

Un autre rôle pour la fiscalité

Cela signifie des transformations profondes passant par la mise en place de nouvelles institutions comme des fonds régionaux et un fonds national pour l’emploi et la formation, un pôle public bancaire, un fonds social, solidaire et écologique adossé à la BCE pour financer le développement des services publics. Cela dans le but de prendre la main sur la création monétaire de la BCE, mais aussi sur la politique du crédit bancaire. Pour assurer le suivi, le contrôle et l’efficacité de ces institutions, la fiscalité doit avoir un tout autre rôle et développer de nouvelles procédures. Un tout autre rôle qui passe par en changer l’objectif. Elle deviendrait un outil majeur d’impulsion d’une nouvelle utilisation de l’argent des entreprises pour de nouveaux modes de production en doublant la fonction de contrôle par une dimension incitative, en rendant progressif l’impôt sur les sociétés, en permettant sa saisine par un droit d’alerte des salariés, en construisant un vrai impôt local sur le capital, en installant un nouvel ISF plus progressif intégrant les biens professionnels, en redéfinissant le barème et la progressivité de l’impôt sur le revenu et des droits de mutation à titre gratuit. Il s’agirait enfin d’établir de vraies coopérations entre les administrations fiscales de l’Union européenne et sur le plan mondial par le biais de l’ONU, pour lutter contre le dumping fiscal, combattre l’évasion fiscale et mettre hors-jeu les paradis fiscaux. Ce qui suppose aussi une autre politique des banques qui sont les premiers pourvoyeurs de ces espaces de non-droit. Enfin, est-ce totalement un hasard si cinq cents familles mettent la main sur la plus grande part du magot, alors que, dans le même temps, cinquante-quatre groupes disposent de 30 % de la valeur ajoutée créée sur notre territoire, c’est-à-dire 600 milliards ?

Jean-Marc Durand est fiscaliste et membre de la commission Économie du PCF.

Cause commune • mars/avril 2022

Éric BOCQUET sénateur communiste: La galette à la pomme

 Intervention d'Eric Bocquet au sénat: Question au gouvernement.




Nous sommes sans doute très nombreux à avoir dégusté en conclusion des fêtes de fin d’année, ou de début, la célèbre galette des rois, même pour les républicains que nous sommes.

Éternel débat entre frangipane et pomme, chez Apple, le fabricant de téléphones, le débat est tranché depuis longtemps, ce sera pomme tous les jours et en plus c’est toujours eux qui décrochent la fève tant espérée.

L’année boursière de 2021 s’était achevée dans un climat d’euphorie généralisée, eh bien 2022, c’est pareil, en matière de pommes, c’est même plutôt la golden, en effet Apple entame 2022 sur les chapeaux de roue. Le groupe à la pomme (c’est son logo) est devenu le premier au monde à passer les 3 000 milliards de dollars de capitalisation boursière lors de la séance du lundi 3 janvier 2022.

À titre de comparaison, l’entreprise fondée par Steve Jobs en 1976 pèse aujourd’hui à elle seule plus que l’ensemble du CAC 40 français, ou que l’économie du Royaume-Uni.

Le groupe avait frôlé cette barre des 3 000 milliards de dollars le 13 décembre dernier, il aura fallu attendre le 3 janvier 2022 pour y parvenir. Bonne année !

Après son entrée en bourse en 1980, Apple avait mis 28 ans à franchir la barre des 1 000 milliards, le groupe avait ensuite mis moins de deux ans à franchir celle de 2 000 milliards, c’était le 19 août 2020.

L’année 2021 fut également prolifique pour « la Pomme », le cours de l’action s’est envolé de 36 %, la firme profite évidemment de l’essor incroyable du télétravail, de l’enseignement à distance, du divertissement et du besoin plus important que jamais de rester « connecté » pendant les confinements successifs. Tous les groupes de la « tech » ne peuvent pas se vanter d’avoir un titre qui a rapporté plus de 45 000 % en vingt ans, soit une moyenne de 37 % par an.

Ce contexte pandémique intéresse aussi beaucoup les investisseurs, car Apple est aussi très généreux à leur égard. En 2020, l’entreprise a versé 14 milliards de dollars de dividendes et a racheté pour 72,5 milliards de ses propres actions, faisant ainsi croître son bénéfice par action de 18 % par an. Il n’y a qu’un chiffre qui ne bat jamais aucun record, c’est celui des impôts payés en France et ailleurs. Joe Biden s’en était ému pendant sa campagne, et depuis… pas grand-chose.

Et heureusement, chez nous, en France… non, non, je m’égare, tout reste à faire.

Bercy annonce une cure d’austérité pour les 5 prochaines années





La trajectoire budgétaire que compte suivre le gouvernement annonce le retour du dogme du 3 % de déficit, l’instauration d’une « règle d’or » et une nouvelle révision des politiques publiques.


Fini le « quoi qu’il en coûte ». L’heure est venue pour les Français de passer à la caisse. Or, l’addition s’annonce salée.

Le ministère des Finances vient de transmettre ses prévisions de trajectoire budgétaire au Haut conseil des finances publiques (HCFP). Selon la feuille de route fournie par Bercy, le gouvernement compte asséner un remède de cheval à la dépense publique en ramenant le déficit public de 9,2 % l’an dernier à 2,8 % du produit intérieur brut en 2027.

Après avoir été mis entre parenthèses par la crise sanitaire et économique, le dogme du 3 % de déficit contenu dans le traité de Maastricht refait donc son grand retour.

À rebours des Etats-Unis

L’objectif du gouvernement est de serrer la vis budgétaire afin de réduire la dette publique. En une année sous Covid-19, celle-ci s’est envolée à 115,7 % du PIB et devrait atteindre 118,3 % en 2025, avant de baisser très légèrement à 118,2 % en 2026 puis de redescendre à 117,7 % en 2027.

En adoptant cette trajectoire, la France est à rebours du grand plan de relance de l’économie des Etats-Unis, annoncé par Joe Biden, qui fait largement appel à l’endettement public puisque les taux d’intérêt sont historiquement bas.

Ce carnet de route va être présenté en Conseil des ministres la semaine prochaine, puis transmis à la Commission européenne dans le cadre du


programme de stabilité fourni tous les ans par les États membres. Le gouvernement compte ainsi retrouver les faveurs de Bruxelles, six mois avant que la France prenne la présidence tournante de l’Union européenne.

« Nous nous donnons cinq ans pour rétablir les finances publiques françaises », affirme le ministère de l’Économie, qui défend un objectif « ambitieux » mais aussi « le choix de la sincérité et de la responsabilité ».

Instauration d’une règle d’or

Le gouvernement est prêt à verrouiller ce tournant de rigueur en soutenant le futur projet de loi organique sur la gestion des finances publiques, dans les cartons de Eric Woerth (LR), président de la commission des finances à l’Assemblé nationale et de Laurent Saint-Martin, rapporteur général du budget.

Une fois votée, cette loi instaurant une « règle d’or » de rigueur budgétaire, contraindrait les gouvernements suivants à tenir ces objectifs austéritaires.

Pour respecter ses engagements de dépenses publiques, le gouvernement espère une croissance soutenue. Après la récession historique de 2020 (-8,2 %), il table sur un retour en 2022 de l’activité à son niveau d’avant crise (+4 %), puis 2,3 % en 2023, 1,5 % en 2024, avant une stabilisation à 1,4 % par an à partir de 2025.

De quoi assurer des rentrées fiscales suffisantes, croise les doigts Bercy, qui n’entend pas augmenter les impôts des particuliers les plus aisés ni ceux portant sur les entreprises. Là encore, la France se comporte à rebours des Etats-Unis qui ont annoncé une augmentation des impôts sur les sociétés pour financer le plan Biden.

Coupes dans les dépenses

Mais cette croissance soutenue ne suffira pas. Le budget de l’État sera donc converti à des politiques de rigueur. Pas d’autre argent public pour soutenir l’économie que les 100 milliards d’euros du plan de relance déjà annoncés pour les deux prochaines années.

Les dépenses publiques seront ramenées à une hausse de +0,7 % par an en moyenne (hors dépenses d’urgence et de relance) jusqu’en 2027, contre une hausse de 1 % par an entre 2017 et 2019, et de 1,4 % par an durant la décennie 2 010. Pour cela, Bercy annonce déjà une nouvelle grande revue des politiques publiques, en vue de choisir celles qui lui semblent prioritaires.

Après une pause due au Covid-19, les coupes claires dans la fonction publique devraient donc reprendre. Le gouvernement répond aux besoins de services publics qui se sont fait jour depuis l’irruption du coronavirus par de nouvelles contractions de l’intervention publique.

C’était le sujet de la Convention managériale de l’État qui s’est tenue jeudi. L’attention médiatique s’est portée sur l’annonce de la suppression de l’ENA.

Mais dans son discours, Emmanuel Macron a demandé à accélérer la mise en pratique de la Loi Dussopt de 2019 dite de Transformation de la fonction publique de 2019, avec notamment de nouvelles suppressions d’organismes publics.

Stéphane Guérard

Article publié dans l'Humanité                                              par Front de Gauche Pierre Bénite


VLOG EPISODE 3 : On traque l'évasion fiscale au Luxembourg.

 


           

Aidé par des lanceurs d'alerte et des élus européens Fabien Roussel fait la lumière sur l'évasion fiscale et le scandale#OPENLUX