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CUBA: ça c'est passer un 25 novembre 1956

Par un petit matin du 25 novembre 1956, un yacht de 18 mètres, avec 82 hommes à bord, le Granma, quittait Tuxpan sur la côte mexicaine pour aller libérer Cuba de la dictature de Batista.

Ce sera ensuite le débarquement dans des conditions très difficiles, l’attaque surprise à Alegria de Pio, les morts, les prisonniers, les trahisons, l’armement perdu et la dispersion de ceux qui ont survécu.

Ce seront aussi les retrouvailles d’une douzaine de guérilleros le 18 décembre, dans la Sierra Maestra, à Cinco Palmas, quand après avoir embrassé son frère Raul, Fidel lui demande :
- Combien de fusils tu apportes ?
- Cinq.
- Avec les deux que j’ai, cela fait sept. Alors oui, maintenant, nous allons gagner la guerre !

Et c’est ce qui est arrivé grâce à la vision stratégique et au sens tactique de ce personnage hors du commun.

Par un curieux coup de l’Histoire, c’est un 25 novembre 2016, soit 60 ans, jour pour jour, après le départ du Granma que Fidel nous a quittés pour un dernier voyage.
Je n’ai pas honte de le dire, ma peine était immense car cet homme, en compagnie d’Ernesto Che Guevara, avait symbolisé l’espoir de ma génération.

En avril 2016, j’étais chez moi, à La Havane, quand j’ai regardé, en direct, son dernier discours à la télévision. Nous savions tous que nous ne le verrions plus nous parler et l’émotion était palpable.

Lui-même l’avait dit : « ce sera peut-être la dernière fois que je parlerai dans cette salle ».

Il est revenu sur son parcours politique, lié à sa volonté de défendre l’indépendance de son pays et de lutter contre l’exploitation des plus pauvres.
Il s’inquiétait aussi pour les futures générations qui allaient devoir résoudre le grand problème d’alimenter des milliards d’êtres humains alors que les ressources naturelles étaient limitées.
Néanmoins, il estimait que le risque majeur pour la terre résidait dans le pouvoir destructif des armements modernes qui pourraient compromettre la paix de la planète et rendre la vie impossible à l’espèce humaine sur toute la superficie terrestre.

Ces dernières paroles témoignaient donc de la vision profondément humaniste d’un de ces géants du 20ème siècle.

Alors, il me semble que les projets auxquels nous participons à Cuba, les campagnes que nous menons contre le blocus sont une façon de rembourser un peu l’énorme dette que les peuples du monde ont envers ce petit pays qui a donné naissance à de tels personnages.
C’est dans ce contexte que s’est tenue la récente rencontre au Parlement Européen de Bruxelles qui fait l’objet d’un article (Dans le ventre de la bête).

Parfois, la tâche qui nous incombe peut sembler trop importante, il convient alors de se souvenir de l’optimisme raisonné de la rencontre de Cinco Palmas et de le faire nôtre.

Un dernier mot : en ne le désignant que par son prénom, je fais miennes les paroles du chanteur cubain Tony Avila dans Balsero : « Nunca le dijo Castro a Fidel » car l’appeler par son nom de famille était réservé à ses ennemis.


Victoire écrasante de la diplomatie cubaine à l’ONU: 185 pays votent contre le blocus étasunien

Seuls 2 pays ont voté contre (les États-Unis et Israël) et 2 se sont abstenus (le Brésil et l'Ukraine).


La Havane, 3 nov. (RHC)- Cuba a célébré ce jeudi une nouvelle victoire diplomatique écrasante dans sa lutte contre le blocus étasunien. Au terme du débat sur le projet de résolution présenté par Cuba, 185 pays ont voté pour, 2 contre (les États-Unis et Israël) et 2 se sont abstenus (l’Ukraine et le Brésil).

Le rapport présenté pour la trentième fois indique qu'entre août 2021 et février 2022 seulement, cette politique unilatérale a causé à Cuba des pertes de l'ordre de 3 milliards 806,5 millions de dollars. Ce chiffre est supérieur de 49% à celui enregistré entre janvier et juillet 2021 et constitue un record en sept mois seulement.

Aux prix actuels, les dommages accumulés pendant six décennies de blocus s'élèvent à 150 milliards 410,8 millions de dollars, avec un lourd fardeau pour des secteurs tels que la santé et l'éducation, en plus des dommages causés à l'économie nationale et à la qualité de vie des familles cubaines.

Au cours des seuls 14 premiers mois de l'administration Biden, les pertes causées par le blocus se sont élevées à 6 milliards 364 millions de dollars, ce qui équivaut à plus de 454 millions de dollars par mois et à plus de 15 millions de dollars par jour, selon le document.

L'impact extraterritorial du blocus porte atteinte à la souveraineté des pays tiers, sanctionne leurs hommes d'affaires et empêche l'accès à leurs ports pour les navires qui accostent à Cuba. Elle empêche également l'importation à Cuba d'articles produits dans n'importe quel pays lorsqu'ils comportent 10% ou plus de composants nord-américains, a dénoncé le ministre des Affaires étrangères dans son discours devant l’Assemblée générale de l’ONU peu avant la mise aux voix.

Source: Prensa Latina

source : https://www.radiohc.cu/fr/noticias/nacionales/303896-victoire-ecrasante-de-la-diplomatie-cubaine-a-lonu-185-pays-votent-contre-le-blocus-etasunien

Environnement et climat: Cuba montre l’exemple en matière de changement climatique


Cuba, petite île assiégée par les États-Unis, prend des mesures concrètes pour réorienter son économie dans le cadre de la lutte contre le changement climatique.

C’est un exemple que le monde entier devrait prendre au sérieux.

Nos remerciements au site "LES AMIS DE CUBA" qui nous a permis de découvrir cet article publié par le site INVESTIGATION.

A voir le très intéressant documentaire "Cuba’s Life Task : Combating Climate Change" sous-titré en français, le lien est en fin d’article.



Cuba n’est peut-être responsable que de 0,08 % des émissions mondiales de CO2, mais cette île des Caraïbes est touchée de manière disproportionnée par les effets du changement climatique. La fréquence et la gravité des phénomènes météorologiques extrêmes – ouragans, sécheresse, pluies torrentielles, inondations – sont en augmentation, au détriment des écosystèmes, de la production alimentaire et de la santé publique.

Si aucune mesure n’est prise pour protéger le littoral de l’élévation du niveau de la mer, jusqu’à 10 % du territoire cubain pourrait être submergé d’ici la fin du siècle. Cela risque d’anéantir les villes côtières, de polluer les réserves d’eau, de détruire les terres agricoles, de rendre impraticables les plages touristiques et de forcer un million de personnes à se déplacer – soit environ 9 % de la population.

Mais à la différence de nombreux pays, pour lesquels l’action en faveur du climat est toujours une promesse pour l’avenir, à Cuba, des mesures sérieuses sont entreprises dès maintenant. Entre 2006 et 2020, plusieurs rapports internationaux ont désigné la nation insulaire comme le leader mondial du développement durable. Et au printemps 2017, le gouvernement cubain a approuvé Tarea Vida (Objectif Vie), son plan à long terme pour faire face au changement climatique.

Ce plan identifie les populations et les régions à risque, formulant une hiérarchie de « zones stratégiques » et de « tâches » en faveur desquelles des climatologues, des écologistes et des experts en sciences sociales travaillent aux côtés des communautés locales, des spécialistes et des autorités pour répondre aux menaces spécifiques. Devant être mis en œuvre progressivement par étapes de 2017 jusqu’en 2100, Tarea Vida intègre également des mesures d’atténuation telles que le passage à des sources d’énergie renouvelables et la mise en œuvre légale des dispositions relatives à la protection de l’environnement.

Au cours de l’été 2021, je suis allée à Cuba pour en apprendre plus sur Tarea Vida et produire un documentaire qui sera diffusé lors de la conférence internationale sur le changement climatique COP26 à Glasgow. Ma visite a coïncidé avec une recrudescence des cas de Covid-19 sur l’île, des mesures de santé publique imposées pour réduire la contagion, ainsi qu’avec les manifestations du 11 juillet. En dépit de ces aléas, nous nous sommes déplacés librement dans La Havane et avons pu interroger des climatologues et des spécialistes des sciences sociales, des décideurs politiques, des responsables de la défense civile cubaine, des personnes dans la rue et des communautés vulnérables au changement climatique.

Sur le littoral de Santa Fe à La Havane, j’ai rencontré un pêcheur vivant avec sa famille au milieu de bâtiments abandonnés. Il m’a expliqué que, lorsque l’eau inonde le rez-de-chaussée, leur maison est comme un navire en mer. Malgré la menace, ils ont l’intention de rester : « Cette maison pourrait se réduire à un simple étage ; je ne bougerai pas », dit-il. La première « tâche » de Tarea Vida consiste à protéger ces communautés vulnérables en relogeant des ménages ou des quartiers entiers.

L’État cubain prend en charge la relocalisation, y compris la construction de nouveaux logements, de services sociaux et d’infrastructures publiques. Cependant, ce n’est pas quelque chose d’obligatoire, ce qui veut dire que ces résidents doivent être impliqués dans le processus de décision et de construction. Il existe également des exemples de communautés proposant leurs propres stratégies d’adaptation, leur permettant de rester sur la côte.

Des siècles d’exploitation d’abord coloniale puis impérialiste et l’imposition du modèle agro-exportateur ont entraîné une déforestation et une érosion chroniques des sols à Cuba.

Tarea Vida est l’aboutissement de décennies de réglementations en faveur de la protection de l’environnement, de promotion d’un développement durable et de recherche scientifique. À Cuba, elle est conçue comme une nouvelle référence de développement, faisant partie d’un changement culturel et d’un processus plus large de décentralisation des responsabilités, des pouvoirs et des budgets vers les communautés locales. Nous constatons ici que les considérations environnementales font partie intégrante de la stratégie nationale de développement de Cuba, et qu’elles ne sont pas seulement une préoccupation à la marge.

Tarea Vida répond également à une nécessité ; le changement climatique a déjà un impact sur la vie sur l’île. « Aujourd’hui, à Cuba, le climat du pays est en pleine transition, passant d’un climat tropical humide à un climat subhumide, ce qui signifie que le régime des pluies, les ressources en eau, la nature du sol et les températures seront différents, explique Orlando Rey Santos, conseiller ministériel qui a dirigé la délégation cubaine à la COP26. Nous devrons nous nourrir différemment, construire différemment, nous habiller différemment. C’est très complexe. »

« De la forêt tropicale au champ de canne à sucre »


Des siècles d’exploitation, d’abord coloniale puis impérialiste, et la généralisation d’un modèle agro-exportateur ont entraîné une déforestation chronique et conduit à l’érosion des sols à Cuba. L’expansion de l’industrie sucrière a réduit la couverture forestière de l’île qui est passée de 95 % avant la colonisation à 14 % au moment de la révolution de 1959, transformant Cuba « de forêt tropicale en champ de canne à sucre »,( From Rainforest to Cane Field) comme l’historien cubain de l’environnement Reinaldo Funes Monzote a intitulé son livre primé. Remédier à cet héritage historique s’est inscrit dans le projet de transformation révolutionnaire de l’après-1959, qui visait à briser les chaînes du sous-développement.

En dépit des premières aspirations des révolutionnaires, Cuba a continué à être dominée par l’industrie sucrière via ses échanges commerciaux avec le bloc soviétique [En 1989, 95% du pays était doté de l’électricité grâce à des accords avec l’URSS, accords qui permettaient aux Cubains de bénéficier du pétrole soviétique en échange de sucre, NdT]. Les activités productives contribuant à la pollution et à l’érosion se sont poursuivies, notamment en raison de l’adoption par Cuba de la « Révolution Verte », de l’agriculture mécanisée [introduction massive de produits phytosanitaires et d’engrais chimiques, de tracteurs, de semences hybrides et de systèmes d’irrigation à grande échelle, NdT] – une approche adoptée dans de nombreux pays en développement pour accroître la production agricole.

Toutefois, les effets délétères ont été progressivement reconnus et peu à peu corrigés, notamment à partir des années 1990. On s’est de plus en plus préoccupé de la protection des richesses naturelles de l’archipel cubain, qui possède une biodiversité extraordinaire et des ressources côtières d’importance mondiale. L’agenda environnemental a été soutenu par la capacité scientifique et institutionnelle de Cuba et facilité par son cadre politico-économique.

Dans son ouvrage sur le droit cubain de l’environnement, Oliver A. Houck a observé que « le droit cubain postrévolutionnaire a promu dès le départ les valeurs publiques et collectives. Les lois environnementales s’inscrivent aisément dans ce cadre ». Dès mai 1959, la Loi sur la Réforme Agraire confie à l’État la responsabilité de protéger les zones naturelles, lance des programmes de reboisement et exclut les réserves forestières de la distribution aux collectivités agricoles. Le système socialiste cubain donne la priorité au bien-être humain et le caractère social de la propriété facilite la protection de l’environnement et l’utilisation rationnelle des ressources naturelles.

Ce processus n’était pas automatique – en fait il a été nécessaire que des géographes et des environnementalistes fassent avancer le programme du gouvernement de l’après-1959 concernant l’environnement. Parmi eux, Antonio Núñez Jiménez, socialiste et professeur de géographie dans les années 1950, s’est particulièrement distingué. Il a été capitaine dans la colonne de l’Armée Rebelle de Che Guevara et a dirigé l’Institut National de la Réforme Agraire, entre autres rôles.

Influencé par Núñez Jiménez, Fidel Castro a également dynamisé le mouvement environnemental cubain. Tirso W. Sáenz, qui a travaillé en étroite collaboration avec Guevara au début des années 1960 et a dirigé la première commission environnementale de Cuba à partir de 1976, m’a dit : « Fidel a été le principal moteur de l’intégration des préoccupations environnementales dans la politique cubaine. » Le parti communiste cubain a également ouvertement approuvé la protection de l’environnement et la croissance durable, ce qui, selon Houck, « confère une très forte légitimité aux programmes environnementaux. »

Tarea Vida s’appuie sur les résultats obtenus par Cuba, leader mondial en matière d’anticipation et de réaction aux risques et aux catastrophes naturelles.

En 1976, Cuba a été l’un des premiers pays au monde à inclure les questions environnementales dans sa Constitution, et à créer une Commission Nationale pour la Protection de l’Environnement et l’utilisation rationnelle des ressources naturelles. C’était onze ans avant que, pour la première fois, le rapport Brundtland des Nations Unies ne présente au monde la notion de « développement durable ».

Au cours des décennies suivantes, des études et des projets ont été entrepris et des réglementations environnementales introduites pour protéger la faune et la flore. En 1992, Fidel Castro a prononcé un discours inhabituellement court mais suffisamment alarmiste lors du Sommet de la Terre au Brésil. Il a imputé la responsabilité de la destruction rapide de l’environnement aux relations internationales fondées sur l’exploitation et les inégalités, résultant du colonialisme et de l’impérialisme et alimentées par les sociétés de consommation capitalistes, qui menacent l’humanité d’extinction.

Cette année-là, un engagement en faveur du développement durable a été introduit dans la Constitution cubaine. Des enquêtes scientifiques sur l’impact du changement climatique à Cuba ont été lancées. En 1994, un nouveau Ministère des Sciences, de la Technologie et de l’Environnement (CITMA) a été mis en place. Il a élaboré une stratégie nationale pour l’environnement, cette dernière a été adoptée en 1997 ; cette même année, la loi 81 a été approuvée par l’Assemblée Nationale. Laura Rivalta, diplômée en droit de l’Université de La Havane et spécialiste des réglementations environnementales, explique que cette loi a donné au CITMA de larges pouvoirs pour « contrôler, diriger et mettre en œuvre une politique environnementale » tout en fixant des « frontières et des limites » aux activités des entreprises étrangères opérant à Cuba. « La nouvelle Constitution cubaine approuvée en 2019 établit le droit de jouir d’un environnement sain et équilibré en tant que droit humain », ajoute-t-elle.


Ne pas être à la solde du profit

Quatre facteurs sous-tendent la capacité de Cuba à mettre en place un plan d’État aussi ambitieux. Tout d’abord, l’économie cubaine, dominée par l’État et planifiée de manière centralisée, contribue à aider le gouvernement à mobiliser des ressources et à orienter la stratégie nationale sans avoir à encourager le profit privé – contrairement à d’autres pays qui s’appuient sur des « solutions de marché » pour lutter contre le changement climatique.

Deuxièmement, Tarea Vida s’appuie sur le bilan de Cuba, leader mondial en matière d’anticipation et de réponse aux risques et aux catastrophes naturelles. Cela a déjà été fréquemment démontré dans le cadre de ses réactions aux ouragans et, depuis mars 2020, en relation avec la pandémie Covid-19.

Troisièmement, le système de défense civile de Cuba, mis en place après l’ouragan dévastateur Flora de 1963. Lors de ma visite au centre de commandement national, le lieutenant-colonel Gloria Gelis Martínez a décrit leurs « procédures opérationnelles et techniques en matière d’alerte précoce concernant l’impact des phénomènes météorologiques extrêmes. Nous avons des zones de surveillance et des zones d’alerte maximale où nous surveillons l’approche d’un événement et son impact. » Un Conseil National de Défense coordonne ce système, qui est répliqué au niveau des provinces, des municipalités et des quartiers dans tout le pays. Le météorologue Eduardo Planos explique :

Au niveau local, les centres d’étude des risques se concentrent sur le phénomène spécifique, et on organise le quartier. Dans chaque quartier, les organismes sociaux prennent des mesures préventives. Les gouvernements locaux mettent en place des conseils de défense locaux, ces derniers gèrent le fonctionnement du système, distribuent des aliments de base pour que les gens n’en manquent pas, et vérifient les installations électriques et le plan d’évacuation.

Quatrièmement, la capacité de Cuba à collecter et à analyser les données locales. Rey Santos souligne ce que cela signifie concrètement :

Les études indiquent que l’élévation moyenne du niveau de la mer sera d’environ 29 centimètres d’ici 2050. Cependant, nous avons effectué la même analyse pour 66 points du territoire national, car il existe des différences en fonction des conditions locales. Réaliser une telle analyse, en transposant les données du GIEC sur l’élévation du niveau de la mer à l’échelle mondiale à chaque endroit de Cuba, ne peut se faire que si l’on s’appuie sur des données scientifiques solides.

Tarea Vida : ça marche


Les résultats 2017-2020 « à court terme » de Tarea Vida sont actuellement en cours d’évaluation. Cette période a coïncidé avec la présidence de Donald Trump et le début de la pandémie de Covid-19. L’administration Trump a considérablement durci les sanctions américaines contre Cuba, entravant davantage son accès aux ressources et aux finances. La pandémie a encore affaibli l’économie à cause de la perte de revenus du tourisme. Néanmoins, des résultats tangibles ont été obtenus : 11 % des habitants des foyers côtiers les plus vulnérables ont été relogés, des fermes coralliennes ont été créées, 380 km² de mangroves ont été récupérés, elles servent de défense côtière naturelle, et 1 milliard de pesos [près de 874 millions d’euros, NdT] ont été investis dans le programme hydraulique du pays. Les programmes de reboisement mis en œuvre depuis 1959 ont permis de porter la couverture forestière à 30 %.

Quels enseignements les autres pays du Sud peuvent-ils en tirer ? Dans l’accord de Copenhague de décembre 2009, les pays développés se sont engagés à financer le climat à hauteur de 100 milliards de dollars par an d’ici 2020. Mais cet engagement n’a pas été respecté. « Ils comptent les financements deux fois, comptent l’argent promis mais non attribué, comptent comme des dons l’argent que reçoit un pays mais qui est en fait remboursé parce qu’il s’agit d’un prêt », se plaint Rey Santos.

« Le financement international est totalement orienté en faveur de l’atténuation, qui est un business. Il y a beaucoup moins d’argent pour l’adaptation. Le financement est extrêmement ténu pour les petits États insulaires en développement [PEID], qui font partie des groupes les plus vulnérables. » Il décrit de « magnifiques » plans de lutte contre le changement climatique, élaborés pour se conformer aux engagements internationaux, puis classés. En revanche, « à Cuba, Tarea Vida est un processus vivant, un aboutissement du système qui l’a généré. »

L’approche cubaine de l’adaptation au changement climatique offre une alternative aux paradigmes dominants au niveau mondial, qui eux reposent sur le secteur privé.

L’accès de Cuba au financement international est plus limité que celui des autres pays en raison du blocus américain, qui l’empêche d’accéder aux banques multilatérales de développement. Cuba dépend plutôt de la coopération bilatérale et des Nations Unies pour le financement et la coopération. Ce n’est pas seulement Cuba qui est frappé directement par les pressions et sanctions américaines, celles-ci visent également ses partenaires potentiels dans les pays tiers. Par exemple, les États-Unis interdisent que soient vendus à Cuba des équipements dont 10 % ou plus des composants sont fabriqués par des entreprises américaines.

L’approche cubaine de l’adaptation au changement climatique et de l’atténuation de ses effets offre une alternative aux paradigmes dominants à l’échelle mondiale, qui eux reposent sur le secteur privé ou les partenariats public-privé. Elle est de plus en plus pertinente pour les PEID (petits États insulaires en développement) des Caraïbes, qui dépendent du tourisme, et pour d’autres pays du Sud qui émergent de la pandémie de Covid-19 en connaissant un niveau d’endettement qui entravera leur accès futur au financement international. Ils se rapprocheront ainsi des restrictions financières et de ressources auxquelles Cuba est confronté depuis des décennies en raison des sanctions américaines. Tarea Vida s’appuie sur des solutions nationales peu coûteuses, et non sur des financements extérieurs.

Rey Santos met en garde contre toute tentative de proposer un programme en faveur du climat sans s’attaquer aux problèmes structurels tels que l’extrême pauvreté et les profondes inégalités sociales et économiques. Selon lui, il est impossible de convertir la matrice énergétique mondiale pour passer des combustibles fossiles aux énergies renouvelables sans réduire les niveaux de consommation, alors qu’il n’y a pas suffisamment de ressources pour produire les panneaux solaires et les éoliennes nécessaires ou alors parce que l’espace pour les accueillir est insuffisant.

« Si vous transformiez automatiquement tous les transports en véhicules électriques demain, vous auriez les mêmes problèmes de congestion, de stationnement, d’autoroutes et de forte consommation d’acier et de ciment, souligne-t-il. Un changement doit s’opérer dans le mode de vie, dans nos aspirations. Cela fait partie du débat sur le socialisme, des idées de Che Guevara sur l’homme nouveau. Si nous ne formons pas cet homme nouveau, il est très difficile d’affronter la question du climat. » Un plan comme Tarea Vida exige une vision qui ne soit pas orientée vers le profit ou l’intérêt personnel. « Il doit être fondé sur l’équité sociale et le rejet des inégalités. Un plan de cette nature requiert un système social différent, et c’est le socialisme », conclut-il.

Il est clair que ce cadre d’économie politique n’existe pas dans d’autres PEID. Mais alors que le sommet de la COP 26 à Glasgow a montré une fois de plus le manque de détermination des gouvernements à agir sur le climat et leur refus d’empiéter sur les intérêts privés, l’approche cubaine consistant à utiliser la science environnementale, les solutions naturelles et la participation de la communauté peut fournir des exemples de meilleures pratiques à ceux qui veulent faire face à la catastrophe climatique.




A voir le très intéressant documentaire "Cuba’s Life Task : Combating Climate Change" sous-titré en français https://youtu.be/APN6N45Q6iU

Helen Yaffe est maîtresse de conférences à l’université de Glasgow. Elle est l’autrice de We Are Cuba ! How a Revolutionary People have Survived in a Post-Soviet World et Che Guevara : The Economics of Revolution.

COP26 : Cuba exhorte les pays riches à respecter leurs engagements en matière de climat


Glasgow, Écosse, 10 nov (Prensa Latina) Le ministre cubain des sciences, de la technologie et de l’environnement (CITMA), Elba Rosa Pérez, a exhorté aujourd’hui les pays développés à respecter leurs engagements financiers et technologiques pour lutter contre le changement climatique.


Le dernier rapport du GIEC (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat) corrobore la gravité de la crise climatique actuelle. C’est pourquoi, lors de cette COP26, nous ne devons pas manquer l’occasion de donner la réponse que l’humanité attend depuis si longtemps, a déclaré M. Pérez.

Le responsable de la Citma a souligné que dans le cas de Cuba, la science prévoit une augmentation de la température de l’air allant jusqu’à 4,5 degrés Celsius d’ici la fin du siècle, une réduction des précipitations de 20 à 60 % et une augmentation du niveau moyen de la mer de 29 centimètres d’ici 30 ans.

À cet égard, M. Pérez a expliqué que le gouvernement cubain a conçu un plan connu sous le nom de « Tarea Vida » pour affronter et atténuer l’impact du changement climatique, qui, dans sa première phase, comprenait la relocalisation d’un groupe d’établissements humains situés dans des zones qui seront submergées d’ici 2050.

Des mangroves ont également été plantées et restaurées, des plages ont été conservées et réhabilitées, et un travail d’éducation et d’implication de la population, notamment des jeunes, a été mené dans le cadre du projet.

Selon le ministre, d’ici 2023 les principales filières agricoles de l’île des Caraïbes devraient avoir mis en place des plans d’adaptation pour assurer la sécurité alimentaire, tandis que l’utilisation échelonnée de véhicules électriques est en cours d’introduction.

Nous nous préparons à mettre en place une stratégie de développement à faible émission de carbone. La chef de la délégation cubaine à la COP26 a exprimé le refus de son pays de toute mesure qui impliquerait l’exclusion ou la limitation de certaines nations de la réception de fonds internationaux pour mettre en œuvre leurs obligations en vertu de la Convention et de l’Accord de Paris sur le changement climatique.

_ « Notre avenir se décide aujourd’hui et dépendra d’un nouveau système de gestion et d’innovation climatique, impliquant tous les acteurs sociaux et économiques, dans le but d’accroître consciemment l’ambition en matière d’adaptation et d’atténuation afin d’atteindre de toute urgence les objectifs mondiaux », a ajouté M. Pérez.

CUBA: Des bêtises si grosses, qu’elles en étoufferaient un « Canard » !




Notre ami Fabien Buhler, a adressé le 15 août dernier, un message à la rédaction du « Canard enchaîné » au sujet de l’article « Vite dit » signé Jérôme Canard, publié le 11 août, rédaction qui lui en a accusé réception. Mais, même en patientant quelques jours, le journal n’en a fait nul état ! Avec l’autorisation de l’auteur du message, nous nous permettons de vous en donner connaissance.

RG


Voir le Canard citer « Le Figaro » pour en approuver l’analyse est une prouesse curieuse, à en perdre ses plumes !

Dans ce petit entrefilet, qui accuse le « Régime Cubain » de « s’avérer incapable de lutter contre la pénurie alimentaire », il n’est fait nulle mention de l’embargo des USA contre ce petit pays, qui a le tort d’être trop près des côtes de la première puissance mondiale sans accepter d’y être inféodée.

Or cet embargo s’est terriblement renforcé avec les mesures prises par Donald Trump, qui a classé comme soutien du « terrorisme » ce petit pays au même moment où les USA négociaient avec les Talibans les accords de Doha leur laissant les mains libres en Afghanistan, mettait en vigueur le titre III de la loi-Helms-Burton que ses prédécesseurs maintenaient suspendu en raison de ses effets dévastateurs, et terrorise avec les moyens des technologies électroniques les banques du monde entier, menacées de sanctions (parfois appliquées sans que les pays concernés ne puissent réagir).



À ce jour, Joe Biden n’a pas jugé « prioritaire » d’annuler ces mesures trumpiennes, ainsi qu’il l’avait promis. À titre d’exemple, Cuba exporte des produits agricoles magnifiques : d’excellents cafés, un très bon cacao, un des meilleurs miel du monde (sans sucre ajouté et surtout sans trace de pesticides), sans parler des dérivés dont le rhum est réputé dans le monde entier, mais la plupart des banques n’acceptent pas d’en transférer les règlements à La Havane, qui se trouve de ce fait en grande difficulté, à l’heure où le tourisme est en berne pour cause de Covid-19, pour payer ses importations de céréales, des cultures peu adaptées au climat antillais.



Cuba où la scolarité est gratuite jusqu’à l’université, la santé gratuite, et la recherche médicale de pointe, est l’objet d’une guerre économique permanente, qui perturbe ses liaisons maritimes comme sa possibilité d’acheter des fournitures indispensables, dès lors que des ressortissants américains sont quelque part actionnaires ou dirigeants de sociétés hors des USA – c’est une guerre permanente et violente, que Le Figaro ignore évidemment. L’assemblée Générale de l’ONU a condamné cet embargo pour la 29e année consécutive, à 182 voix contre 2, mais ne comptez pas sur Le Figaro pour le rapporter.



Je suggère à Jérôme Canard de s’informer plutôt auprès de l’excellente « Lettre hebdomadaire de Cuba-Coopération », dont je vous joins un récent numéro, cela lui éviterait de dire des bêtises si grosses qu’elles en étoufferaient un Canard.



Fabien BUHLER « Ambassadeur pour Cuba de l’OSCI - l’Organisation des Sociétés de Commerce International »






La justice étasunienne attaque une grande entreprise française travaillant à Cuba



Le gouvernement cubain a lancé en 2013 une zone spéciale de développement dans le port de Mariel. Cette zone est destinée à accueillir des investissements étrangers dans des conditions fiscales et douanières privilégiées et à positionner Cuba dans le trafic maritime international très actif dans cette zone voisine du canal de Panama. En 2016 faisant suite au dégel diplomatique consécutif à la visite de François Hollande à Cuba la compagnie français CMA CGM, 3° transporteur mondial de conteneurs, a créé un terminal portuaire à Mariel. Son activité s’y poursuit en compagnie de sa filiale logistique CEVA. Depuis cette date des navires opérés par cette compagnie française font régulièrement escale dans ce port cubain.

Mais la CMA CGM vient d’être poursuivie par un tribunal étasunien en application de la loi Helms Burton. On peut trouver une excellente description des dispositions de cette loi et de son caractère illégal au regard du droit international dans le Journal officiel de la République française (voir ci-après).


Loi américaine Helms-Burton
10e législature
Question écrite n° 17434 de M. Xavier de Villepin (Français établis hors de France - UC)
publiée dans le JO Sénat du 12/09/1996 - page 2315
M. Xavier de Villepin attire l’attention de M. le ministre des affaires étrangères sur la loi américaine Helms-Burton à l’encontre de Cuba. Cette législation vise à un renforcement de l’embargo exercé par les Etats-Unis et ouvre des facultés de rétorsion de caractère extraterritorial. Il souhaiterait donc savoir si la France envisage d’intervenir auprès de l’Union européenne et de l’Organisation mondiale du commerce. La question se pose également pour la loi américaine d’Amato. Il serait intéressant de savoir si nos entreprises ne seront pas directement on indirectement affectées par ces législations d’inspiration profondément unilatérales.

Réponse du ministère : Affaires étrangères publiée dans le JO Sénat du 17/10/1996 - page 2701


Réponse. - La loi américaine dite Helms-Burton prévoit des sanctions à l’encontre d’entreprise et de particuliers d’Etats tiers supposés profiter de biens ayant appartenu à des ressortissants américains et expropriés par le Gouvernement cubain. Elle comporte des dispositions d’application extraterritoriale qui sont contraires au droit international et aux engagements internationaux des Etats-Unis. Plusieurs actions ont été engagées pour empêcher la mise en oeuvre de ce texte. Une étroite concertation entre les pays membre de l’Union européenne a permis d’engager diverses initiatives politiques (déclaration de l’Union, démarches auprès des autorités américaines). La procédure de règlement des différends prévue par le traité OMC a également été actionnée ; elle pourrait aboutir à la constitution prochaine d’un panel, la procédure de conciliation n’ayant pas donné de résultats. Enfin, la commission a reçu mandat du Conseil d’élaborer une législation " en miroir ", qui permettrait aux entreprises européennes de se prémunir contre les effets de la loi Helms-Burton. De son côté, la France s’est engagée à titre national dans la préparation d’une législation analogue qui donnerait aux sociétés françaises concernées par la loi Helms-Burton la possibilité de protéger leurs intérêts devant les tribunaux. Ces actions ont d’ores et déjà obtenu des résultats, puisque le Président des Etats-Unis a suspendu le droit ouvert à d’anciens propriétaires de biens expropriés d’attaquer en responsabilité civile devant les tribunaux américains les investisseurs ayant acquis les biens concernés. Ce premier pas, encourageant, n’est pas suffisant. Aussi, la France et l’Union européenne continuent-elles d’étudier et de mettre en place les diverses mesures adéquates. Il en va de même pour la loi d’Amato, qui institue un embargo secondaire contre l’Iran et la Libye (sanctions contre les entreprises d’Etats tiers effectuant des investissements nouveaux dans le secteur des hydrocarbures supérieurs à 40 millions de dollars dans ces deux pays). Des contre-mesures sont à l’étude au sein de l’Union européenne. Une action précontentieuse a été engagée à l’OMC. Aucune entreprise française n’a pour le moment été directement affectée par les lois Helms-Burton et d’Amato, ce qui ne signifie pas que nos entreprises ne puissent pas être touchées à l’avenir. En tout état de cause, l’effet de ces législations est avant tout dissuasif : elles visent autant à décourager l’investisseur potentiel qu’à sanctionner l’investisseur effectif. Aussi les autorités françaises, comme l’Union européenne dans son ensemble, sont-elles déterminées à réagir fermement et à assurer celles de nos entreprises qui hésitent à investir qu’elles seront défendues.
Erratum : JO du 31/10/1996 p.2865

On notera au passage que la fermeté ainsi affichée par la diplomatie française en 1996 ne semble plus de mise aujourd’hui.

La plainte émane d’une famille cubano-étasunienne de Miami qui, pour faire simple, prétend que la CMA CGM lui a volé sa place sur les quais de Mariel qu’elle a quittés en 1959.

Voirhttps://www.docdroid.net/xqjfqwW/demanda-familia-cubanoamericana-pdf

La CMA CGM risque une amende de 1 milliard de dollars.

Cette action est une démonstration flagrante que la politique anti cubaine de l’équipe Biden ne le cède en rien à celle de l’équipe Trump.

Question : La République française qui en Juin à l’ONU a voté pour la levée de l’embargo sur Cuba va-t-elle élever la voix et protester ?

EN 2020, LES ETATS UNIS ONT VERSÉ PLUS DE 5 MILLIONS DE DOLLARS À DES GROUPES DE DÉSTABILISATION CUBAINS

 

Les Etats Unis, via la NED (National Endowment for Democracy - Fondation Nationale pour la Démocratie), ont versé plus de 5 millions de dollars à des groupes de déstabilisation cubains en 2020. 

En parallèle à l'organisation de l'asphyxie économique de l'île, via son blocus illégal, les Etats Unis arrosent copieusement ses valets pour tenter de renverser la révolution et le socialisme à Cuba. 

Article et traduction Nico Maury


En 2020, les Etats Unis ont versé plus de 5 millions de dollars à des groupes de déstabilisation cubains
5.077.788 dollars US est la somme que la National Endowment for Democracy (NED, Fondation nationale pour la démocratie) a versé à des groupes cubains pour renverser le socialisme et la révolution à Cuba pour la seule année 2020. Depuis 2017, la NED a fait transiter vers l'île plus 16,5 millions de dollars.

La NED est une fondation privée fondée en 1983 sous le gouvernement de Ronald Reagan et dirigée par le parti républicain et démocrate. Elle tire ses financements du budget du ministère des Affaires étrangères consacré à l'Agence des États-Unis pour le développement international (USAID). La NED est un outil des Etats Unis pour financer le renversement de gouvernements par des coups d'état et des révolutions colorées.

La NED verse des millions de dollars aux "oppositions" désignées par les Etats Unis. Au Venezuela où elle a versé plus de 14 millions de dollars pour renverser Nicolas Maduro en 2014, en Ukraine, la NED a financé le coup d'état d'EuroMaïdan, en Pologne c'est 1 million de dollars qui a été versé au "syndicat" Solidarność, en Chine où la NED finance des groupes "culturels" Ouighours, etc.

5.077.788 dollars en 2020

Les organisations d'opposition cubaines ont reçu plus de 16,5 millions de dollarsde subventions de l'Agence des États-Unis pour le développement international (USAID) depuis 2017, et 54 organisations ont été désignées comme recevant des financements américains, souvent acheminés par le biais du National Endowment for Democracy.

En 2020, la NED a versé 5.077.788 dollars à 42 organisations à la solde de l'impérialisme. La liste est disponible ICI 
Le Président Cubain, Miguel Diaz-Canel, a avertis que des opportunistes cherchaient par tous les moyens à profiter de la crise économique pour renverser la révolution et le socialisme. Si les États-Unis veulent vraiment aider le peuple cubain, ils doivent mettre un terme au blocus. Ce dernier a coûté aux cubains 753 milliards de dollars.

Vaccins contre la COVID-19 : histoires de monopole, de chantages et d’inégalités



Un article que certains pourront trouver long, très long il est vrai ! Mais c’est un document qui peut servir de référence. Car il s’agit plutôt d’un dossier extrêmement complet, une analyse très poussée et documentée comme nous aimerions en lire plus souvent dans les médias français assez discrets y compris dans le journalisme d’investigation...ceux-ci ne devraient-ils pas poser les vraies questions pour nous éclairer comme cela leur incombe ? ?Cela vaut la peine de se poser un moment et de réfléchir loin des analyses superficielles, des contradictions des dizaines de médecins et autres pseudo spécialistes qui se succèdent sur nos écrans, sur nos ondes et dans les réseaux sociaux.
Chantal Costerousse



Les appréhensions que le vaccin AstraZeneca / Oxford a suscitées dans certains pays, la sale campagne des États-Unis contre le vaccin russe Spoutnik V et le refus notifié des nations les plus puissantes de permettre à leurs sociétés pharmaceutiques de libérer temporairement les brevets de leurs antidotes contre la COVID- 19, ont encore mis à rude épreuve la disponibilité des vaccins et ont approfondi les profondes différences dans le droit à la vie entre les puissants et les pauvres dans ce monde.

Jamais auparavant une urgence sanitaire n’avait tant frappé dans autant d’endroits et en si peu de temps. La COVID-19 a déjà affecté plus de 120 millions de personnes dans le monde et a causé la mort de plus de 2,6 millions d’êtres humains.
Un tel défi universel méritait une réponse globale et coordonnée. Mais une fois encore, passant outre les exigences de l’ONU et de l’Organisation mondiale de la santé, ce sont les nationalismes, les mesquineries, le pouvoir écrasant des sociétés trans-nationales, « le sauve qui peut », qui ont prévalu.

Les vaccins semblent être les seuls obstacles efficaces à la pandémie. Seule une vaccination majoritaire de la population mondiale pourrait arrêter la transmission croissante du virus SRAS-CoV-2. Mais ni les transnationales pharmaceutiques ni les gouvernements des pays riches n’ont cette vocation de réponse collective et de solidarité mondiale.

QUI PEUT DEVELOPPER ET PRODUIRE DES VACCINS ?

L’industrie pharmaceutique et biotechnologique souffre d’une forte concentration et d’une transnationalisation. Les grandes entreprises des pays développés et des économies émergentes monopolisent la recherche, la production et la distribution de médicaments. Neuf d’entre elles font partie des 100 entreprises qui génèrent le plus de revenus au monde.

Selon Euromonitor Global, l’industrie pharmaceutique est responsable de près de 4% de l’activité de production mondiale. Si c’était un pays, il serait parmi les 15 économies les plus riches de la planète. Près de la moitié des ventes totales du secteur proviennent de la Chine et des États-Unis, suivis de la Suisse, du Japon, de l’Allemagne et de la France.


Ce marché mondial a généré 37 milliards de dollars en 2018 et on estime qu’en 2027 il dépassera 64,5 milliards.

Les nations sous-développées - qui sont la grande majorité - n’ont guère la capacité de développer leurs propres vaccins (Cuba est l’une des rares exceptions honorables) et n’ont pas non plus leurs propres capacités de production. Cela leur a laissé peu de marge de manœuvre pour influencer l’évolution inégale des vaccins au milieu de la pandémie.

Depuis que l’OMS a déclaré le COVID-19 comme pandémie le 11 mars 2020, elle a appelé à une solution concertée et conjointe face à la menace. Mais la logique furieuse du marché dicte les orientations dans notre monde et ce qui s’est passé depuis lors est une course effrénée pour se faire une cible (immunitaire et financière) dans laquelle les crocs en jambe, les pressions et même les chantages n’ont pas manqué.

Les grandes puissances se sont alliées dès le départ aux plus grandes sociétés pharmaceutiques pour gérer convenablement la recherche d’une solution qui leur permettrait de sortir avantageusement de la crise sanitaire et économique qui ravage le monde.

Les gouvernements ont fourni au moins 8,6 milliards de dollars pour le développement de vaccins, selon la société d’analyses Airfinity.

Les États-Unis, l’UE et le Royaume-Uni ont investi des milliards dans le vaccin AstraZeneca, développé par l’Université d’Oxford. L’Allemagne a investi 445 millions de dollars dans le vaccin développé par Pfizer et son partenaire allemand, BioNTech. Le vaccin de Moderna a été entièrement financé et coproduit par le gouvernement des États-Unis.

Des organisations philanthropiques ont contribué pour 1,9 milliard. Des personnalités individuelles telles que Bill Gates, le fondateur d’Alibaba Jack Ma et la star de la musique country Dolly Parton ont apporté leurs contributions.
Seuls 3,4 milliards de dollars proviennent des propres investissements des sociétés pharmaceutiques, dont une partie provient également de financements externes.
Bien que Big Pharma n’ait fourni qu’un tiers du financement, à qui profitent les avantages économiques ? Qui a établi les règles du jeu dans la distribution des vaccins ?

UN JEU DELOYAL

Réaliser le vaccin contre le COVID est devenu, au-delà de l’intérêt sanitaire, un objectif géopolitique. Quiconque parviendra à se procurer le vaccin capitalisera sur sa commercialisation et quiconque disposera de plus de ressources financières pourra accaparer davantage de vaccins.

Scandaleuse fut la manœuvre de l’administration Trump, dès mars 2020, pour que la société allemande CureVac (qui avait commencé à faire des recherches sur un éventuel vaccin) quitte son siège dans le pays européen et qu’elle s’installe aux États-Unis en échange « de grosses sommes d’argent ». Tout comme il stockait des tests PCR, des ventilateurs pulmonaires, des masques et des accessoires de biosécurité, Washington a, dès le début, entrepris de s’accaparer de plus la production et la distribution de vaccins.

A tout cela se sont ajoutées des campagnes de discrédit, parfois subtiles et parfois manifestes, contre les candidats vaccins de Russie et de Chine, dans une tentative concertée de bloquer leur chemin vers d’autres marchés.

De nombreux doutes ont été semés sur la rapidité des développements, la qualité des essais cliniques et l’efficacité des vaccins candidats des deux pays ; en particulier contre Spoutnik V des Laboratoires Gamaleya.

Après que le principal vaccin russe a été certifié par ses autorités et a suscité l’intérêt de plusieurs pays, les États-Unis et l’Union européenne lui ont fait des crocs en jambe partout.

Le rapport annuel 2020 du ministère américain de la Santé et des Services sociaux (HHS) a récemment révélé que le Bureau des affaires mondiales (OGA) avait utilisé le Bureau de l’attaché pour la santé au Brésil pour persuader le gouvernement de ce pays sud-américain de « rejeter le Vaccin russe contre la covid19 ».

Face à la révélation, le porte-parole présidentiel russe Dimity Peskov a déclaré :
« Dans de nombreux pays, l’ampleur de la pression est sans précédent (...) de telles tentatives égoïstes pour que les pays abandonnent certains vaccins sont dépourvues de perspective.

Nous pensons qu’il devrait y avoir le plus grand nombre de doses de vaccins possible afin que tous les pays, y compris les plus pauvres, aient la possibilité de stopper la pandémie ».

L’Union européenne, pour sa part, n’a pas encore donné le feu vert au vaccin russe pour être appliqué dans ses pays membres, bien que cette région soit à la traîne dans la disponibilité des vaccins ; ceci concerne aussi les États-Unis, le Canada, le Royaume-Uni et Israël, et bien que la prestigieuse revue de santé The Lancet ait reconnu dans une publication la grande efficacité de Sputnik V.

Au-delà de ces barrières, les vaccins russes et chinois ont fait leur chemin dans différentes régions, en raison de l’efficacité démontrée et de la pénurie mondiale de vaccins.

La Slovaquie a même quitté le giron de l’Union européenne pour acquérir 2 millions de doses de Spoutnik V et la Hongrie, qui a également approuvé l’utilisation du vaccin russe et a acquis des doses du Sinopharm chinois, qui n’a pas non plus reçu le feu vert de l’Agence européenne des médicaments.

CHANTAGE SANS ANESTHESIE

Les États ont réalisé le plus gros investissement, mais BigPharma a fixé les conditions et conservé les revenus. Le monopole de quelques multinationales dans l’achat et la production de vaccins anti COVID-19 donne à ces entreprises un pouvoir écrasant.

Des rapports récents montrent comment le géant pharmaceutique Pfizer a tenté d’imposer des conditions onéreuses aux nations d’Amérique latine pour leur fournir certaines quantités de son vaccin.

Le président brésilien Jair Bolsonaro a montré ces jours-ci son malaise face aux exigences de Pfizer à l’égard de son gouvernement, notant que parmi les conditions posées par le consortium figure une clause du contrat d’achat qui l’exonère de « toute responsabilité » pour les éventuels effets secondaires de son vaccin.
« Nous avons été très durs et ils ont été très durs avec nous. Ils ne changent pas une seule virgule. Le gouvernement s’en occupe actuellement avec le Congrès et les discussions portent sur l’assouplissement de la loi », a déclaré pour sa part le ministre brésilien de la santé, le Général Eduardo Pazuello, récemment limogé.
L’Argentine, le Pérou et la République Dominicaine ont également subi des pressions intenses de la part de Pfizer, comme le montre une enquête du Bureau du journalisme d’investigation.



Les représentants de Pfizer à Buenos Aires ont exigé d’être indemnisés contre toute plainte civile que les citoyens pourraient déposer s’ils subissaient des effets indésirables après avoir été vaccinés. « Nous avons proposé de payer des millions de doses d’avance, nous avons accepté cette assurance internationale, mais la dernière demande était extraordinaire : Pfizer a exigé que les actifs souverains de l’Argentine fassent également partie de la garantie légale », a avoué un fonctionnaire argentin.
« C’était une demande extrême que je n’avais entendue, que lorsque la dette extérieure devait être négociée, mais dans un cas comme dans celui-ci, nous l’avons immédiatement rejetée ».

De nombreuses voix s’élèvent pour mettre en garde contre le fait que l’urgence de disposer de vaccins pour une maladie qui a fait tant de morts dans le monde pourrait avoir conduit certains gouvernements à accepter des limitations significatives de responsabilités et pour exiger la transparence sur les accords avec les entreprises pharmaceutiques.

Le professeur Lawrence Gostin, directeur du Centre de collaboration pour le droit de la santé nationale et mondiale de l’Organisation Mondiale de la Santé, a déclaré : "Les sociétés pharmaceutiques ne devraient pas utiliser leur pouvoir pour limiter l’accès à des vaccins vitaux dans les pays à faibles ou moyens revenus et a signalé que la protection de la responsabilité ne devrait pas être utilisée comme "une épée de Damoclès suspendue au-dessus de la tête de pays désespérés dont les populations sont désespérées ».



Même la puissante Europe semble avoir ressenti la pression. Bien que les accords de l’UE avec les fabricants de vaccins avec leurs principales clauses, soient gardés secrets. La stratégie d’achat de vaccins rendue publique par la Commission européenne stipule que la « responsabilité du développement et de l’utilisation du vaccin, y compris toute compensation spécifique requise, sera supportée par les États membres qui achètent le vaccin ».

QUI POURRA ETRE VACCINE EN 2021 ?

Les capacités de production de vaccins dans le monde sont insuffisantes pour disposer des doses nécessaires à la vaccination de la population mondiale cette année.

Selon la Fédération internationale de l’industrie du médicament (FIIM), la demande mondiale de vaccins est estimée entre 10 et 14 milliards de doses en 2021.
Selon les statistiques citées par la société de données Statista, les États-Unis peuvent produire près de 4,7 milliards de doses de vaccin COVID-19 et l’Inde plus de 3 milliards de doses potentielles. La Chine, qui n’était pas auparavant un acteur majeur sur le marché des exportations de vaccins, s’est engagée à produire plus d’un milliard de doses.

La Grande-Bretagne, la Russie, l’Allemagne et la Corée du Sud font également partie des centres de fabrication établis, mais avec une capacité de production moindre.
Face à cette réalité, l’iniquité et l’injustice du monde actuel sont une fois de plus évidentes : les pays les plus riches ont acheté la plupart des vaccins qui seront produits en 2021 (même pour les stocks), tandis que les nations pauvres n’auront pas de doses à administrer, même aux fractions les plus vulnérables de leur population. Plus de 100 nations attendent l’arrivée de la première ampoule.
On estime que 90 % des habitants de près de 70 pays à faible revenu n’auront pas la possibilité d’être vaccinés contre le COVID-19 cette année.

Les nations les plus puissantes ont profité de leur pouvoir d’achat et de leurs investissements dans la mise au point de vaccins pour se procurer l’antidote tant convoité.

Jusqu’à présent, environ 12,7 milliards de doses de divers vaccins contre le coronavirus ont été achetées à l’avance, ce qui est suffisant pour vacciner environ 6,6 milliards de personnes (à l’exception de celui de Johnson & Johnson, tous les vaccins approuvés jusqu’à présent nécessitent deux doses).

Plus de la moitié de ces doses, 4,2 milliards assurés, avec la possibilité d’acheter 2,5 milliards supplémentaires, ont été achetées par des pays riches qui ne représentent que 1,2 milliard de personnes.

Le Canada a acheté suffisamment de doses pour vacciner chaque Canadien cinq fois, tandis que les États-Unis, le Royaume-Uni, l’Union européenne, l’Australie, la Nouvelle-Zélande et le Chili en ont acheté suffisamment pour vacciner leurs citoyens au moins deux fois, bien que certains des vaccins n’aient pas encore été approuvés.
Israël a conclu un accord portant sur 10 millions de doses et la promesse d’un approvisionnement régulier de la part de Pfizer en échange de données sur les personnes vaccinées. Selon les rapports, le pays a également payé 30 dollars par dose, soit le double du prix payé par l’UE.

Comme le déclarait Irene Bernal, chercheuse sur l’accès aux médicaments à l’ONG Salud por Derecho (NdT : la santé de plein droit) au journal El País en décembre dernier, « nous constatons que celui qui a l’argent est celui qui a l’accès.
53% des vaccins ont été conservés par 14% de la population des pays riches, par conséquent, quand les doses vont-elles arriver dans les pays les plus pauvres ?



Les pays à faible ou moyen revenu qui regroupent 84 % de la population mondiale, ont conclu des accords directement avec des sociétés pharmaceutiques, mais n’ont jusqu’à présent obtenu que 32 % de l’approvisionnement.

« Nous traversons une crise d’une telle ampleur », a déclaré Fatima Hassan, fondatrice de l’initiative sud-africaine pour la justice en matière de santé. « Si, même en Afrique du Sud, nous ne parvenons pas à vacciner rapidement la moitié de notre population, je n’ose même pas imaginer comment le Zimbabwe, le Lesotho, la Namibie et le reste de l’Afrique vont s’en sortir.

Si cela doit durer encore trois ans, nous n’obtiendrons aucune immunité continentale ou mondiale ».

Le président mexicain Andres Manuel Lopez Obrador et son ministre des Affaires étrangères Marcelo Ebrard ont demandé aux autorités américaines de les autoriser à acheter une partie des dizaines de millions de vaccins AstraZeneca produits aux États-Unis, que Washington a stockés sans avoir approuvé leur utilisation. D’autres pays qui ont déjà approuvé le vaccin le réclament.

Le Mexique, l’un des pays où la COVID-19 est la plus présente, a jusqu’à présent administré environ 4,4 millions de doses à l’aide des vaccins de Pfizer, AstraZeneca, Sinovac et Sputnik V, à une population de plus de 128 millions de personnes, ce qui représente un faible taux de vaccination, selon www.ourworldindata.org, un site web géré par l’Université d’Oxford.

Selon les données recueillies par Bloomberg, à la date du jeudi 18 mars, plus de 410 millions de doses ont été administrées dans le monde, dans quelque 132 pays, ce qui représente seulement 2,7% de la population mondiale.

APARTHEID VACCINAL



Les scientifiques et les militants nous mettent en garde contre un "apartheid vaccinal", dans lequel les populations du Sud seront vaccinées des années après celles de l’Occident.

Non seulement les pays les plus pauvres seront obligés d’attendre, mais beaucoup d’entre eux doivent déjà payer un prix beaucoup plus élevé par dose.

L’Ouganda, par exemple, a annoncé un accord portant sur des millions de vaccins fournis par AstraZeneca à 7 dollars la dose, soit plus de trois fois le prix payé par l’Union européenne. En incluant les frais de transport, il faut compter 17 dollars pour vacciner complètement un Ougandais.

Les effets de cette iniquité seraient graves. Un modèle développé par l’Université de Northeastern indique que si les 2 premiers milliards de doses de vaccins Covid-19 étaient distribués proportionnellement à la population nationale, les décès dans le monde seraient réduits de 61%.

Mais si les doses sont monopolisées par 47 des pays les plus riches du monde, on ne sauvera 33 % de personnes en moins.

Les scientifiques craignent également que si les pays ne sont pas en mesure de vacciner une grande partie de leur population, le virus aura davantage de possibilités de continuer à muter, ce qui augmentera le nombre de décès dans ces pays sous-vaccinés et rendra les vaccins disponibles moins efficaces au fil du temps.

Comme l’a fait remarquer le Directeur général de l’OMS, le Dr Tedros Adhanom Ghebreyesus, au début de l’année : « ... nous sommes confrontés à un réel danger : si les vaccins apportent de l’espoir à certains, ils deviennent une pierre de plus dans l’édifice de l’inégalité entre ceux qui ont des ressources et ceux qui n’en ont pas ».

UNE ALTERNATIVE MODEREE

La difficulté à assurer l’approvisionnement en vaccins rendra de nombreux pays pauvres dépendants de Covax, une organisation créée en avril 2020, coordonnée par l’OMS, la Coalition pour les innovations dans la préparation aux épidémies et GAVI, l’alliance internationale pour les vaccins.

Covax a pour objectif de fournir 2 milliards de doses dans le monde, dont au moins 1,3 milliard à 92 pays à faible ou moyen revenu, d’ici à la fin de 2021.
Cela suffirait à vacciner 20 % de la population de chaque pays, en donnant la priorité aux professionnels de la santé, aux personnes âgées et aux personnes souffrant de pathologies sous-jacentes, bien que cet objectif ait été critiqué comme étant inadéquat pour faire face à la pandémie.

Les analystes estiment plutôt que Covax fournira tout au plus entre 650 et 950 millions de doses, réparties entre 145 nations, dont certaines ont suffisamment d’accords confirmés pour que leurs citoyens soient vaccinés plusieurs fois, comme le Canada et la Nouvelle-Zélande.

Les entreprises pharmaceutiques n’ont pas tenu leurs promesses de livraison à COVAX et AstraZeneca, qui était le principal fournisseur, est également confronté à sa propre situation particulière avec des millions de doses retenues aux États-Unis et en Europe.

MEME L’EUROPE N’EST PAS EPARGNEE PAR L’IMPASSE

L’Allemagne a suspendu à partir de lundi 15 mars la vaccination avec AstraZeneca le seul vaccin européen existant à ce jour ; le vaccin AstraZeneca/Oxford, est en proie à de graves difficultés après que l’on ait signalé une trentaine de cas de problèmes de coagulation chez des personnes vaccinées avec ce vaccin.

Treize pays de l’UE ont déjà suspendu la vaccination avec AstaZeneca, bien que l’OMS et l’agence européenne de régulation défendent son utilisation comme ayant plus d’avantages que d’effets néfastes.

Pour aggraver les choses, en pleine résurgence de la pandémie dans la région, AstraZeneca n’avait livré que 25 % des doses convenues à l’UE pour le premier trimestre et Pfizer était également en retard dans ses livraisons.

Début 2021, l’Italie a menacé de poursuivre Pfizer pour avoir réduit de 29 % la distribution de doses dans ce pays. La Commission européenne annonce maintenant qu’elle a conclu un accord avec Pfizer/BioNTech pour avancer 10 millions de doses pour le deuxième trimestre de l’année.

Bien que BioNtech et CureVac soient allemands, le pays européen a rencontré des problèmes avec la vaccination. Le quotidien Der Spiegel soulignait il y a quelques semaines que « l’Union européenne et l’Allemagne pourraient manquer de vaccins ».
Le retard dans la signature des contrats avec les entreprises pharmaceutiques pourrait signifier que les vaccins arrivent en retard, en plus de ne pas être assez nombreux".

L’UE a jusqu’à présent administré 11 doses pour 100 personnes, contre 33 doses aux États-Unis et 39 doses au Royaume-Uni, selon l’indice Bloomberg Vaccine Tracker.
La faible disponibilité et la distribution inégale au sein de l’Union ont conduit des pays comme l’Autriche, la Bulgarie, la République tchèque, la Croatie et la Lettonie à exprimer publiquement leur mécontentement et à demander une « correction » de la distribution.



Face à ce dilemme, la Commission européenne a décidé que les entreprises pharmaceutiques qui possèdent des usines de vaccins sur les territoires de l’UE ne pourront pas exporter la production qu’elles génèrent vers d’autres régions si elles ne reçoivent pas l’autorisation de les faire sortir du pays de la part des autorités de ces nations.

Le 4 mars déjà, l’Italie - l’un des pays les plus durement touchés par la pandémie – a utilisé la décision de l’UE pour interdire l’exportation vers l’Australie de 250 000 doses du vaccin d’Astrazeneca, que le groupe pharmaceutique anglo-suédois a produit dans son usine d’Agnani, près de Rome.

Alors que les frustrations s’intensifient, certains responsables européens accusent les États-Unis et le Royaume-Uni. Le président du Conseil européen, Charles Michel, a déclaré que les États-Unis, ainsi que la Grande-Bretagne, « ont imposé une interdiction totale d’exporter des vaccins ou des composants de vaccins qui sont produits sur leur territoire ».

Interrogée à ce sujet, Jen Psaki, l’attachée de presse de la Maison Blanche, a déclaré aux journalistes que les fabricants de vaccins étaient libres d’exporter leurs produits fabriqués aux États-Unis tant qu’ils respectaient les termes de leurs contrats avec le gouvernement.

Mais comme le vaccin d’AstraZeneca a été produit avec l’aide de la loi « Defense Production Act », pour lequel il a reçu un financement de plus d’un milliard de dollars, M. Biden doit approuver les expéditions de doses à l’étranger.

AUCUN OBSTACLE POUR UN COMMERCE FLORISSANT

Les pays les plus puissants ont fait passer les profits pharmaceutiques avant l’immunité mondiale, malgré le discours politique selon lequel il n’y aura pas de solution à la pandémie si elle n’est pas jugulée au niveau mondial.

La semaine dernière, le jour même où l’OMS a déclaré que le COVID-19 était une pandémie, les États-Unis, l’Union européenne, le Royaume-Uni et le Canada (qui disposent tous de suffisamment de vaccins) ont bloqué la dernière tentative des pays pauvres ou les pays à revenu moyen en accélérant l’accès aux vaccins et aux traitements pour la COVID-19, en levant temporairement des règles de l’Organisation Mondiale du Commerce protégeant la propriété intellectuelle.

Une résolution parrainée par l’Afrique du Sud et l’Inde et soutenue par 57 pays, qui demandait la suspension pendant la pandémie des parties de l’accord ADPIC (Accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce) qui protègent les brevets médicaux, a été rejetée par le bloc des nations riches. Elle avait déjà connu le même sort lors des discussions tenues à l’Organisation Mondiale du Commerce en octobre et décembre 2020.

Un accord aurait permis aux nations sous-développées ou émergentes de produire des médicaments et des vaccins contre la COVID sans attendre ou adhérer à des accords de licence avec les sociétés pharmaceutiques qui détiennent la propriété intellectuelle de ces produits médicaux. Cela aurait permis de développer la production d’antidotes à cette maladie mortelle et de réduire les coûts de traitement.
Les gouvernements des pays riches, qui financent majoritairement les vaccins anti-COVID, ont fondé leur refus sur la crainte que la libération de la propriété intellectuelle, même temporaire, ne réduise les incitations à la recherche des entreprises et se sont également demandé si les pays « en développement » pourraient commencer à produire les médicaments suffisamment tôt pour empêcher la propagation du virus.

La vérité est que les grandes multinationales pharmaceutiques, le bigpharma, étaient initialement réticentes à financer la recherche sur les vaccins contre le COVID en raison de l’incertitude d’une course contre la montre pour obtenir des résultats et de la faible rentabilité dans le passé de la création de vaccins pour les urgences sanitaires.

Les médicaments recherchés par ces entreprises sont principalement ceux proposés aux citoyens des pays riches et surtout ceux nécessaires aux maladies chroniques qui nécessitent des doses systématiques, ce qui les rend très rentables.

Mais après avoir constaté la rentabilité que la durabilité dans le temps que la COVID-19 peut leur apporter, ils ne veulent désormais aucune limite à la "fête" des revenus dont ils bénéficient face à la demande urgente de vaccins.

Moderna a déclaré avoir signé des accords d’achat anticipé pour plus de 18 milliards de dollars pour des fournitures à livrer cette année, pendant que Pfizer a prévu des revenus d’environ 15 milliards de dollars cette année pour son vaccin avec BioNTech.
Les principaux concepteurs de vaccins ont bénéficié de milliards de dollars de subventions publiques, mais les sociétés pharmaceutiques se sont vu accorder le monopole de leur production, ainsi que des bénéfices qu’ils génèrent.

Les prix de vente des vaccins aux différents pays (ils sont variables) sont gardés sous le sceau du secret des accords signés entre les compagnies pharmaceutiques et les gouvernements, bien que le site spécialisé Statista ait calculé le prix moyen par dose dans ces montants :


Multipliez ces chiffres par les milliards de doses qui sont nécessaires chaque x années (en fonction de la durée de l’immunité obtenue par ces vaccins) et nous verrons à combien s’élèvera la valse des millions.

Mais si les sociétés pharmaceutiques tirent profit et contrôlent le rythme et l’ampleur des vaccinations, le coût de l’inégalité de la distribution des vaccins pour l’économie mondiale pourrait atteindre 9 milliards de dollars, selon Katie Gallogly-Swan, une chercheuse travaillant avec la Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement (CNUCED).

« Il est inconcevable qu’au milieu d’une crise sanitaire mondiale, d’énormes sociétés pharmaceutiques multimilliardaires continuent de privilégier les profits, de protéger leurs monopoles et d’augmenter les prix, au lieu de privilégier la vie des gens partout, y compris dans le Sud », a tweeté à juste titre le sénateur américain Bernie Sanders il y a quelques jours.

« Le monde est au bord d’un fiasco moral catastrophique », a déclaré le Directeur Général de l’Organisation Mondiale de la Santé.

En attendant, ici à Cuba, nous croisons les doigts pour que nos vaccins Soberana et Abdala nous immunisent tous, sans distinction, avant la fin de cette année.


Vaccin thérapeutique cubain contre le cancer du poumon




Candace Johnson, directrice de l’Institut de Cancérologie Roswell Park, fait l’éloge du vaccin cubain contre le cancer du poumon. Elle s’est entretenue avec la journaliste de CNN Christiane Amanpour à propos de l’innovation cubaine dans le domaine de la biotechnologie : nous travaillons tous pour améliorer l’humanité mais les cubains vont plus loin car ils sont déterminés à aider les personnes, spécialement les personnes souffrant de maladies dévastatrices.


CIMAvax-EGFhr est un vaccin en étape avancée pour le cancer du poumon composé par EFG (un facteur de croissance épidermique conjugué à une protéine externe et un adjuvant (le Montanide ISA51). Ce vaccin induit la fabrication d’anticorps qui s’unissent au récepteur du EFG (EFG-R), en rendant impossible l’interaction [EFGâ+ « EFG-R] et ainsi la tumeur se réduit considérablement.

Ce vaccin thérapeutique fabriqué par le Centre d’Immunologie Moléculaire de La Havane a été testé ces 5 dernières années à l’Institut pour le traitement du cancer Roswell Park aux Etats-Unis. Cet Institut termine une étude qui évalue l’efficacité du vaccin cubain connu sous le nom de CIMAvax dans le traitement du cancer du poumon.

En outre, il a été confirmé que le vaccin cubain affecte le facteur de croissance épidermique dont les cellules cancéreuses du poumon ont besoin pour se développer, montrant que les patients qui ont un cancer depuis longtemps avaient une réponse immunitaire très forte et que le vaccin thérapeutique réduisait les niveaux de ce facteur de croissance.

Candace Johnson explique que les cellules cancéreuses sont dépendantes de ce facteur de croissance et que, par conséquent, quand des facteurs de croissance sont présents, la tumeur se développe. Par conséquent, si on pouvait éliminer ce facteur chez le patient, la tumeur disparaîtrait peut-être.

Actuellement, des essais cliniques sont en cours dans ce centre et dans d’autres institutions de New York. Donc certains des concepts initiaux de ce vaccin thérapeutique ont été validés.

Johnson a déclaré que les immunologistes cubains sont les scientifiques les plus brillants et les plus innovants avec lesquels elle ait travaillé : ce sont des personnes véritablement extraordinaires. Elle a fait l’éloge du génie de l’immunologie cubaine car immuniser quelqu’un contre une protéine n’est pas chose facile.

La Havane: Les deux vaccins cubains contre le covid-19 entrent dans la dernière ligne droite des essais cliniques




Dans les prochains jours, Cuba placera dans la phase finale des essais cliniques deux vaccins contre le covid-19 développés dans ses laboratoires. Ils s'appellent Soberana 02 et Abdala, et à partir du mois de mars, leur efficacité sera testée sur des dizaines de milliers de volontaires à La Havane, Santiago de Cuba et Guantánamo, bien que le Mexique et l'Iran puissent également participer à la phase III de l'essai Soberana 02. Cuba est le premier pays d'Amérique latine à aller aussi loin dans la mise au point de son propre vaccin, une réussite scientifique qui le rapproche de l'objectif de vacciner l'ensemble de sa population avant la fin de l'année, même si elle contraste avec la crise et les pénuries aiguës que connaît l'île.


"Les résultats obtenus jusqu'à présent sont encourageants : les deux vaccins candidats se sont révélés sûrs et capables de générer des anticorps spécifiques contre le virus, d'inhiber la liaison de la protéine virale au récepteur cellulaire (porte d'entrée du virus dans la cellule) et de neutraliser l'infection virale dans des cultures de cellules humaines sensibles. Nous sommes optimistes ; jusqu'à présent, les candidats ont dépassé les objectifs que ces étapes exigent au niveau international", a déclaré à El PAÍS Eulogio Pimentel, vice-président du groupe d'entreprises cubain BioCubaFarma, qui regroupe 32 instituts, centres de recherche et industries de production biotechnologique et pharmaceutique.

Nous sommes au Centre d'ingénierie génétique et de biotechnologie (CIGB), et Pimentel sort papier et crayon : il dit que la semaine dernière le monde a atteint un pic de vaccinations, 6 160 000 doses administrées en une seule journée. "Mais à ce rythme, dit-il, il faudra trois ans et cinq mois pour vacciner la population mondiale".

Le pari de Cuba est différent : développer son propre projet de vaccin et produire 100 millions de doses avant la fin de l'année, ce qui permettrait de répondre à ses besoins intérieurs (vacciner 11,2 millions de Cubains) et d'exporter le reste.

"Si tout se passe bien dans cette troisième phase d'essais cliniques [la dernière avant l'approbation d'un vaccin], dans quelques mois, nous pourrons commencer la vaccination de masse et la conclure avant la fin de 2021. Nous serions l'un des premiers pays au monde à parvenir à l'immunisation de l'ensemble de sa population", affirme M. Pimentel. Il confirme qu'un premier lot de 150 000 doses de Soberana 02 a déjà été produit avec succès et qu'un deuxième lot est en cours d'élaboration. De même, Abdala (nommé d'après le poème patriotique du héros national de Cuba, José Martí) est entré dans la phase de production à grande échelle, pour commencer les essais cliniques dans les semaines à venir.