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Commémoration à Montigny-en Gohelle le 29 mai au Dahomay

 



Exerçons le droit de mémoire : mai-juin 1941, 100 000 mineurs osent la grève !


Le 27 mai 1941, à la fosse Dahomey à Montigny-en-Gohelle, le mineur Michel Brûlé donne la consigne de stopper les compresseurs. Tous les marteaux-piqueurs s'arrêtent. C'est la grève générale. En 48 h, elle mobilise 100 000 mineurs du Pays noir de Auchel à Crespin sur 130 km.
Cette mobilisation a été initiée par un petit groupe d'hommes réunis clandestinement à Dechy (près de Douai) dans l'estaminet de Célestin Leduc, autour de Martha Desrumaux, dirigeante du PC. Neuf mois de réunions clandestines, de distributions de tracts et de journaux en particulier L'Enchaîné clandestin. De multiples discussions dans les salles des pendus et plus encore dans les entrailles de la terre ont permis de briser la chape de plomb sous laquelle l'occupant, Vichy et les collaborateurs enfermaient les travailleurs du sous-sol.


Pierre Chéret, responsable de la FNDIRP, brosse ce qu'était ce Pays noir, un véritable maquis souvent connu par les seuls mineurs, cheminots ou métallos. Un territoire marqué par des luttes en particulier ce grand printemps de 1936 du Front populaire où les travailleurs ont conquis de nouveaux droits (congés payés...) et retrouvé leur fierté.
Pierre Chéret évoque la dureté de l'Occupation, la présence des préfets, de la police, de la gendarmerie et de la justice acquis à Vichy, d'un patronat prompt à collaborer, d'une presse muette soumise à la censure, et de dirigeants syndicaux - maîtres des UL et UD, acquis eux-aussi à la politique collaborationniste de Pétain et Vichy.
Pendant neuf mois, réunions clandestines, débrayages et grèves ont permis aux mineurs et à leurs familles de prendre conscience de la nocivité mortifère de la résignation, de l'Occupation et de la collaboration. Ils se sont souvenus de leurs luttes et de leurs victoires d'avant-guerre. Ainsi le Pays noir est devenu une véritable poudrière. L'étincelle surgit ce 27 mai 1941 !


Ce 27 mai, le pari est gagné ! Pendant quinze jours, les molettes au sommet des chevalements ne tournent plus. 500 000 tonnes de charbon ne sont pas extraites et n'iront pas alimenter la machine de guerre nazie comme le rappelle le maire de Montigny-en-Gohelle, Marcella Della Franca, et Jean-François Raffy, sous-préfet de Lens.
Tous deux insistent sur le rôle essentiel des femmes mobilisées pour faire connaître et amplifier le mouvement.
Les 4 et 5 juin, ces femmes sont plusieurs centaines à manifester dans les rues de Billy-Montigny en scandant : " Pas de carbon pour les boches !"
Ainsi la grève se dévoile sous ces deux aspects : grève revendicative et grève patriotique !


Interpellant une demie douzaine de jeunes du Lycée Pasteur d'Hénin-Beaumont accompagnés par leur proviseur, Pierre Outteryck souligne qu'aujourd'hui cette histoire trop méconnue doit être portée par la jeunesse de notre région. Il propose qu'en 2022, de grandes manifestations mettent en avant cette grève extraordinaire.
La sénatrice Cathy Apourceau et tous les participants ne peuvent oublier que le premier convoi de déportés partis de France vers le système concentrationnaire nazi fut composé de 244 ouvriers-mineurs : 136 ne reviendront jamais !


Pierre Outteryck
Professeur agrégé d'histoire

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