Alimentation, transports, aides à domicile… de nombreux domaines économiques sont ciblés par l’ubérisation. En moins d’une décennie, les applis ont envahi nos vies, faisant de la politique du « clic » et de l’instantanéité la nouvelle norme. Derrière ces nouveaux modes de consommations, c’est un véritable capitalisme de plateforme qui a pris place avec des plateformes numériques de travail qui façonnent non seulement beaucoup de nos activités au quotidien, le monde du travail mais aussi notre modèle de société.
Présent à Strasbourg pour le rendez-vous annuel des communistes aux universités d’été qui se sont tenues les 26, 27 et 28 août derniers, Pascal Savoldelli, sénateur communiste du Val-de-Marne, a sensibilisé les camarades, tant au « choc » qu’au « choix » de société de ce nouveau modèle alimenté par la numérique ubérisation. Dans son intervention, il rappelle que si les avantages de ce modèle semblent nombreux, il est important de s’interroger sur la façon dont notre société pourrait en subir les conséquences et pousse à réfléchir aux alternatives à ce capitalisme qui tend à nous vendre l’actualisation de ses formes de domination, d’exploitation et d’aliénation comme de nouveaux espaces de liberté.
L’aboutissement d’un rêve néo-libéral
En s’affranchissant des règles de concurrences et des règles sociales et fiscales, c’est une véritable offensive pour un acte fondateur qui s’opère avec l’ubérisation. Uber, Deliveroo, Docadom et consorts, avec la complicité de différents gouvernements, ont réussi à disrupter le marché avec succès en rendant leurs nouveaux standards de qualité de services et d’orientation client incontournables. D’une part, les entreprises traditionnelles n’ont d’autres choix que de s’aligner sur ce modèle pour survivre. De l’autre, c’est le retour du travail à la tâche et du tâcheron enfermé dans la précarité. Ce même forçat qui devrait remercier ces multinationales d’être enfermé dans la boite noire de l’algorithme. Affectant le statut de l’emploi, les conditions de travail, le rapport à l’espace et au temps de travail, c’est une véritable casse du salariat et de ses protections qu’entraine la plateformisation de la société.
Une nécessaire organisation collective
L’une des premières stratégies pour lutter contre l’ubérisation repose sur l’organisation collective. Le travail ubérisé est par essence une forme d’emploi qui se veut rendre les mobilisations improbables. Cependant, entre actions collectives pour requalifier l’activité de ceux qui offrent leur service en emploi salarié, création de « mutuelle de travail associé » et mise en place de plateforme coopérative de communs numériques, l’uberisation doit constituer un terrain de lutte de classe sans merci. Si les algorithmes nous enferment dans une bulle, il ne tient qu’à nous de nous ouvrir à nouveau au rassemblement. L’ubérisation relève bien évidemment d’une lutte syndicale qu’il convient d’adapter et d’organiser pour répondre aux nouveaux défis que pose le monde du travail numérique et l’ubérisation. Il ne tient qu’à nous de reconstruire un service commun qui porterait une institution de la valeur pour le travail des communes contre la seule qui existe à ce jour, celle du capital.
Pour un nouveau modèle de société
Ce qu’on appelait la “question sociale” doit opérer un retour en force dans nos réflexions. Remettant complètement en question le modèle économique traditionnel, le modèle du salariat et de l’emploi et, encore pire, le caractère interventionniste de notre État, l’ubérisation rappelle qu’il est urgent de penser la société que nous voulons, puis d’agir pour la construire. C’est dans cette volonté d’impulser une nouvelle orientation politique que, dans le prolongement de sa proposition de loi sur la requalification en statut salarial, Pascal Savoldelli a, pour le groupe CRCE, récemment légiféré sur le rôle des algorithmes et leur seuil d’interférence à l’autonomie des travailleurs. Car pourquoi faudrait-il adouber l’uberisation de l’économie sans en interroger l’idéologie et les effets délétères à long terme ? Ce monde-là n’est pas une fatalité. Le chantier est immense et à engager d’urgence. À penser sur le temps long, il est politique au sens premier du terme.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire